Rebecca Zlotowski filme bien. Mais elle ne filme rien. Son film est vide. Pire, comme De rouille et d'os, Grand central est le pur produit d'une bourgeoisie de gauche bienveillante qui fantasme la classe ouvrière d'un air désolé. Et c'est insupportable.

Pourtant, Grand central aborde frontalement un sujet rare, mais ô combien sensible. Évoquer la sous-traitance dans les centrales nucléaires, son absence de qualification et toutes les conséquences que cela peut avoir, en faire le cœur d'une fiction, donnait au second film de Rebecca Zlotowski des atouts de taille. Mais on n'y comprend finalement pas grand chose, l'équipe de sous-traitance se résumant à un camp de mobil-homes vaguement gouverné par un type à grande gueule. Si les interventions dans la centrale sont bien là, si l'on mesure un peu de quoi il retourne, le tout se dilue dans ce qui est l'autre sujet du film, et qui annule tout le reste, l'histoire d'amour impossible, la romance à deux balles, le vaudeville ouvrier...

Cette histoire, on n'y croit pas un quart de seconde. Tout y est convenu, faux, fabriqué, grotesque. Et puis, résumer une relation amoureuse à quelques tripotages dans l'herbe et deux-trois regards mouillés, c'est un peu limite. Quand on apprend enfin le pourquoi du comment, ce qui aurait pu avoir un sens est tout simplement ridicule.

Léa Seydoux est mauvaise. Ni charismatique, ni même jolie, elle est aussi fausse et déplacée que sa coiffure. Tahar Rahim, d'habitude si lumineux, est à demi éteint, comme s'il n'y croyait pas lui-même. Olivier Gourmet en fait trop et s'auto-caricature. Denis Ménochet se la joue mutique en grand type blessé. Seul Johan Libéreau, toujours aussi charmant, réussit à faire exister un personnage pourtant très secondaire.

La mise en scène est élaborée. Le travail du son est riche et habité. La musique s'accorde bien à l'image élégante. Rebecca Zlotowski aime filmer les hommes en slip, et c'est bien. Mais tout ça ne suffit pas. Grand central est un film raté, un produit marketé pour les critiques à bonne conscience, du faux cinéma social, du vrai cinéma vain.
pierreAfeu
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le 4 sept. 2013

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pierreAfeu

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