S'attaquer à l'oeuvre célèbre de Léon Tolstoï était un projet ambitieux en 1956 à Hollywood, c'est une adaptation aux moyens colossaux, écrite par 6 scénaristes, avec une photo splendide de Jack Cardiff, la musique de Nino Rota, et un casting international. J'en ai lu des passages plus jeune, mais je n'ai jamais eu le courage de finir ce bouquin fleuve auquel ce film rend un bel hommage en dépit de défauts. D'abord, je ne suis pas passionné par le sujet, je lui préfère Docteur Jivago même si vous allez me dire que ça n'a rien à voir, mais ça se passe quand même en Russie. Le grand défaut de ce film vient surtout de son casting trop international qui n'est pas adapté, on imagine mal Henry Fonda avec son accent très américain dans la peau d'un étudiant russe, de même que Audrey Hepburn n'était peut-être pas l'actrice idéale pour le rôle de Natacha ; le seul qui s'en sort bien est Herbert Lom qui campe un Napoléon correct. L'autre défaut est la réduction narrative par rapport au roman, bien que le film soit pourtant très long. Sinon King Vidor se sort avec adresse du piège de la reconstitution historique, il transforme cette campagne de Russie en drame romanesque, le style est un peu ampoulé, mais il réussit dans sa direction d'acteurs, dans le visuel, et la bataille est bien ordonnée, en dépit d'un aspect partiel ; les scènes de la retraite de Russie avec le passage pathétique de la Bérézina (tourné dans le nord de l'Italie), ainsi que l'incendie de Moscou (reconstitué en Yougoslavie) figurent parmi les morceaux de bravoure. Tourné entre L'homme qui n'a pas d'étoile et Salomon et la reine de Saba, ce film est un des derniers de Vidor, c'est une superproduction pas totalement réussie, mais l'effort reste louable.