Gueules noires
5.6
Gueules noires

Film de Mathieu Turi (2023)

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Après deux essais plus qu’imparfaits mais qui tentaient quelque chose dans le registre du film de genre à la française, « Hostile » et son huis-clos nocturne postapocalyptique et « Méandre » et son labyrinthe mystérieux et meurtrier, Mathieu Turi voit les choses en (un peu) plus grand avec « Gueules noires ». On est ici dans un film d’époque qui prend comme contexte les mines de charbon du Nord de la France au sein desquelles le cinéaste va intégrer des éléments fantastiques et horrifiques. Un projet ambitieux avec un casting plus costaud et des élans mystiques et légendaires. Cela aurait pu donner une bonne petite série B hargneuse, intense et extrême, et ainsi ajouter une petite pierre à l’édifice branlant du film de genre tricolore. Las, si le début s’avère prometteur, le film s’enlise dans le ridicule et le raté plus il progresse.


Au début, du prologue assez angoissant et mystérieux en passant par le premier tiers réaliste, on a envie d’y croire. La reconstitution et la présentation du travail des mineurs apparaît appliquée et documentée et la mise en place des enjeux se révèle rapide et efficace. Lorsque notre groupe de mineurs aux caractères assez sommaires (le raciste, le bon vivant, le gentil, le leader, ...) descend au fond de la mine, on laisse à « Gueules noires » le bénéfice du doute. Les profondeurs de ces mines de charbon offrent au film un côté étouffant et anxiogène du meilleur effet. Puis, quand le fantastique et la menace font leur entrée, le long-métrage de Turi va doucement mais surement glisser vers le comique involontaire alors qu’on nage en plein premier degré ainsi que le foireux sur toute la ligne. C’est simple, passé la première moitié, plus rien ne va et on hésite entre le malaise gêné et la consternation.


C’est bien simple : on est censé être dans un climat de tension et, au moins, être un tant soit peu effrayé. Mais cela n’arrivera malheureusement jamais. La créature est complètement loupée et ressemble à une marionnette géante ou aux monstres que l’on retrouve dans les trains fantômes des fêtes foraines. Turi a voulu éviter les images de synthèse mais le rendu de cette chose en animatronique frise la blague involontaire ce qui déteint sur certaines séquences la mettant en scène. Alors oui il y a bien deux ou trois scènes gores bien troussées mais noyées dans un grand n’importe quoi. Et, sur la fin, les acteurs jouent mal et sont nantis de dialogues basiques et tout aussi risibles que les situations dans lesquelles ils s’illustrent. Comme ses personnages dans la mine, plus le film s’enfonce et plus on a l’impression d’être devant une série Z qui se prend trop au sérieux.


« Gueules noires » s’avère donc être une grosse déception et une nouvelle preuve de la difficulté du cinéma français à réussir des films de ce type même si on sait que le budget alloué semble très limité. Il y a bien quelques exceptions comme le récent et très bon « Le Mangeur d’âmes », légende dont il est question ici mais amené d’une manière sur explicative d’un effet douteux, mais ils sont peu courants. Et ne parlons pas de la facilité avec laquelle le protagoniste maghrébin comprend tout et parvient à s’extirper de ce cauchemar : de manière ridicule comme l’est ce film auquel on préfèrera même le pourtant très moyen « Méandre », vaguement inspiré de « Cube » et qui ne prêtait pas à rire (ou pester au choix) devant tel désastre.


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JorikVesperhaven
4

Créée

le 5 août 2024

Critique lue 7 fois

Rémy Fiers

Écrit par

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