Hannibal
Avec Hannibal, Ridley Scott n’offre malheureusement pas un film de sérial killer digne de ce nom mais arrive laborieusement à créer un simple petit polar mal fagoté, souvent boursouflé, jamais...
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Presque dix années se sont écoulées depuis les cinq Oscars majeurs remportés par Le Silence des agneaux. Ridley Scott reprend alors le flambeau de Jonathan Demme en offrant à la tétralogie son deuxième volet. Mais là où les idées tombaient à pic chez son prédécesseur, elles tombent le plus souvent à plat avec lui. Le scénario a en effet tout du produit de consommation courante : un millionnaire défiguré, qui fut l'une des victimes d'Hannibal Lecter, rêve de se venger en soudoyant le FBI et en manipulant Clarice Starling, l'enquêtrice héroïne du premier film, dont la réputation vient d'être injustement écornée. Le tueur en série fugitif, qui fit le miel des médias et retrouvera vite une place de choix dans la liste des criminels les plus recherchés, se cache quant à lui en plein jour, en Italie, sans que personne, jamais, n'ait été capable de l'identifier ! C'est surtout l'occasion pour Ridley Scott de délocaliser une partie de l'intrigue à Florence, renforçant ainsi le côté raffiné et cultivé du psychiatre cannibale, tout en tournant dans une myriade de décors historiques : le Ponte Vecchio, le Palazzo Vecchio, la pharmacie de la Santa Maria Novella ou encore le Duomo, symbole de l'architecture du Quattrocento. En tout, il y eut en fait plus de cent décors utilisés pour Hannibal. Tout ça pour ça ?
Le résultat n'est clairement pas à la hauteur des attentes. La musique de Hans Zimmer peine à égaler, dans sa fonction tutrice, celle d'Howard Shore. La réalisation demeure trop académique pour réellement surprendre et donne souvent l'impression d'une série B impersonnelle artificiellement gonflée par un gros budget. Des failles d'autant moins pardonnables que le scénario, lui non plus, n'a rien d'original ou d'ingénieux : on déplore l'absence de tout réel fil conducteur ; la relation ambiguë liant Clarice et Hannibal repose sur la même dualité de fascination-répulsion déjà observée chez Jonathan Demme, sans vraiment apporter d'éléments nouveaux ; tant la vengeance planifiée que l'enquête policière semblent préférer aux champs d'exploration le petit guide illustré du parfait thriller générique. Il y a bien une (discrète) critique du FBI, partiellement corrompu, et un surplus de spiritualité dû notamment à Florence, mais rien qui puisse modifier en profondeur la tonalité générale – forcément déceptive. Du coup, Ridley Scott prend appui sur plusieurs scènes voulues atroces (la dégustation de cerveau en apothéose), quelques tirades bien troussées (le « J'envisage sérieusement de manger votre femme » lâché à l'inspecteur italien Rinaldo Pazzi) et sur un duo de comédiens recomposé, puisque Julianne Moore, impeccable, remplace l'inoubliable Jodie Foster. N'est-ce pas là le propre du divertissement jetable ?
Créée
le 7 août 2018
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