De l'art de rendre fascinant un film constitué à 90% de plans fixes sur des mecs qui parlent assis en tailleur dans la même pièce.
C'est vachement bien.
En tout et pour tout, c'est mon deuxième visionnage d'un film de sabre. Excusez le novice. Mais n'empêche, c'est vachement bien.
Nul besoin de connaitre l'histoire du Japon pour apprécier Hara-Kiri. Car c'est avant tout un film réalisé au poil. Je vous la fait vite, puisque de toute façons n'importe quelle spectateur dont la vue ne serait pas altérée par une grave malformation pourra s'en rendre vite compte spontanément: mise en scène sobre et fascinante, décors simples mais envoûtants, plans picturaux, acteurs impeccables, photographie superbe et puis, et puis... ah oui, le tout baigne dans une lancinante musique mi-traditionnelle mi-contemporaine bruitiste. Si je devais sélectionner deux ou trois plans issus du film pour illustrer un article, une revue ou autre, je serais bien embêté. Car tous les plans de ce bijou sont mémorables. Une atmosphère de malaise, malsaine, couvre tout ce récit dramatique et pesant.
Mais à propos de récit, il ne faut surtout pas que je parle l'intrigue d'Hara-Kiri. Même dans ses grandes lignes. Ce serait gâcher votre surprise. Oui je sais, c'est con une critique où ne peut parler de rien concernant le film. Disons simplement qu'il s'agit d'une oeuvre sur l'honneur, sur l'écriture de l'histoire, sur les traditions, les hiérarchies sociales, mais aussi sur la pauvreté, sur les petites gens, les injustices. C'est tarte, dit comme ça... Mais Hara-Kiri n'est pas une vague brassade pompeuse de concepts de philo de comptoir. Ô que non. L'hara-kiri, c'est l'art de se fendre les tripes avec un sabre. Et justement, le film vous prend aux tripes et ne vous les lâche plus. Je sais, c'est un jeu de mots douteux.
Le film est lent, très lent même, solennel, serein et grave. Un film où l'on entend presque une mouche voler de même que les battements de coeur des protagonistes accélérer, alors que se dévoilent tous leurs noirs secrets. Hara-Kiri est doté d'un rythme, d'enjeux et d'une réalisation quasi chorégraphique, dignes des meilleurs westerns. Car après tout, c'est bel et bien un western, où les sabres ont simplement remplacé les Colt. Et si par malchance vous ne pouvez pas ou ne voulez pas vous faire les 2h de film... Matez au moins les 20 premières minutes, absolument glaçantes, monstrueuses et magnifiques tout à la fois. Kobayashi, je n'avais jamais entendu parler de toi, mais rolala dis-donc, je te retiens dans un coin de ma tête.