J’ai à mon grand étonnement beaucoup apprécié cette série B qui se prend et est à prendre comme telle. Sans prétention mais avec un savoir-faire certain, Heretic est un pur divertissement efficace qui captive et à tient en haleine.
Deux jeunes missionnaires mormones, en quête de conversions, frappent à la porte d'une maison isolée après une journée infructueuse. Accueillies par le charmant Mr Reed, elles découvrent rapidement que l'endroit cache de sombres secrets. Piégées dans un labyrinthe terrifiant, leur survie dépendra de leur ingéniosité.
Heretic est une pure série B qu’il faut prendre comme telle et qui puise son inspiration dans le terreau fertile des sectes religieuses, souvent exploitées dans les films d’horreur. Ne surtout pas s’attendre à une once de spiritualité ou à un questionnement de la foi et de la croyance. La religion n’est que le prétexte d’un thriller haletant qui ne se veut pas autre chose. En témoigne, le premier dialogue très drôle autour des préservatifs magnum.
Peut-être aurais-je en temps normal ignoré cet énième film horrifique, n’étant pas très friand du genre. Mais j’avais lu une bonne critique dans Libération. Il y a Hugh Grant au casting. Et je venais de découvrir mais le très beau mais dur dessin animé de Michel Hazanavicius (La plus précieuse des marchandises) et je souhaitais voir quelque chose de plus léger. Résultat ? Une première expérience dans le genre qui m’a totalement conquis.
Le film brille par sa maîtrise de l’angoisse et du suspense, surtout dans sa première partie. Ce qui relève à mon avis du brio, c’est que toute l’inquiétude repose avant tout sur les dialogues. L’angoisse naît des contrastes entre ce qui est dit et ce qu’on ne voit pas : cette tarte aux myrtilles sans cesse évoquée mais jamais visible, ou encore cette mystérieuse Mme Reed, à l’image de l’épouse de Colombo, dont tout le monde parle mais qui tarde à se manifester. Scott Beck et Bryan Woods parviennent à nous conditionner (et même nous manipuler) très habillement.
Le huis clos est aussi un élément central, mais il est abordé de manière originale. Mais ici, l’approche des réalisateurs est assez originale. On change de pièce à mesure que le récit évolue. On reste à chaque fois très longtemps dans chacune des pièces, mais on descend à chaque fois d’un cran supplémentaire vers le sous-sol (vers les enfers ?). Ce voyage vertical, presque métaphorique, renforce la tension à chaque étape.
La deuxième partie, en revanche, devient plus classique, avec des effets visuels appuyés, une prophétesse mi-vivante mi-morte et une esthétique sombre et décadrée. C’est assez dommage que les deux réalisateurs cèdent aux effets plus classiques mais toujours efficaces et perdent un peu le sel qui rendait le début du film si réussi.
Malgré cela, le film ne souffre d’aucun temps mort. Dès les premières scènes, les réalisateurs nous plongent dans une ambiance anxiogène portée par des dialogues ciselés et des confrontations verbales intenses entre les deux héroïnes et leur bourreau. Ces joutes, volontairement exagérées, n’ont pas pour ambition de soulever un débat profond sur la foi, mais servent uniquement à alimenter un suspense palpitant.
Le coup de maître reste le casting de Hugh Grant en Mr Reed. Car bien qu’il ait vieilli, il garde toujours un côté très séduisant physiquement, dans sa voix et dans son élégance. Une séduction qu’il conjugue pour la première fois avec un soupçon de perversité et dont il houe avec malice, comme s’il nous disait constamment que tout ceci n’est qu’un jeu. Ce qu’il fait subir aux deux héroïnes comme le film lui-même.