Holy Flame of the Martial World démontre encore une fois, s'il en était besoin, à quel point la politique de production de la Shaw Brothers dans les années 80 était à coté de la plaque. Pas que le film soit mauvais, loin de là, c'est un Wu Xia particulièrement réjouissant mais totalement hors phase avec les attentes du public local de 1983. Comédie et films d'action urbains avaient définitivement pris la relève des films de Kung Fu traditionnels et autres Wu Xia rendant l'obstination de la Shaw dans ce domaine quasi suicidaire (Holy Flame obtient la 59e place du Box office Hong Kongais de 1983...). Le studio n'était pourtant pas totalement inconscient de ces faits, et place Holy Flame dans une optique post Zu, c'est-à-dire en utilisant massivement les effets spéciaux et autres techniques de câble pour donner un coup de jeune au genre. Une bonne idée mais qui ne suffit pas à faire oublier les autres éléments trop datés (décors en studios, costumes, intrigue classique...) à un public sevré au genre. Autrement dit, ce qui avait fait la force du studio est devenu avec les années 80 un poids dont elle ne parvient pas à se débarrasser.
Mais revenons au film proprement dit, qui visionner hors contexte de 1983 se révèle une excellente surprise. Un Wu Xia sans temps morts, résolument sérial qui ne pourra que plaire aux amateurs de Buddha's Palm et autres films du même genre. On notera d'ailleurs à quel point la frontière entre la mort du Wu Xia fantastique (1984/85) et sa résurrection (au début des années 90) est mince !
Le scénario en lui-même ne fait que recycler les figures habituelles du genre : Conflits pour régner sur le monde des arts martiaux, histoires de familles et de trahison... Holy Flame n'innove narrativement en rien mais a des bases solides pour s'affirmer sur un autre terrain, celui du visuel et du rythme.
Bien que de l'aveu de certains de ces membres même, le département SFX de la Shaw ne marchait pas vraiment, les effets spéciaux du film tiennent encore largement la route. La différence de qualité avec les Wu Xia des années 90 n'est même pas forcément à la défaveur du film de 1983 ce qui montre bien son efficacité dans ce domaine. Evidemment il s'agit essentiellement d'incrustations sur la pellicule afin de donner forme aux pouvoirs des personnages. Technique rodée et qui marche toujours aussi bien, surtout pour le final où les pouvoirs s'enchaînent à toute vitesse !
Cette vitesse est d'ailleurs le gros point fort du film. Pas le temps de s'ennuyer un seul instant : Les scènes d'action s'accumulent à un rythme d'enfer, laissant juste ce qu'il faut pour le développement des personnages et de l'histoire (et de légers intermèdes comique). Un vrai concentré de Wu Xia ! Philip Kwok et Yuen Tak font preuve d'une belle énergie dans leurs chorégraphies, utilisant massivement les câbles (probablement plus que Zu), trampolines, undercranking et autres techniques de montage. Les puristes martiaux peuvent tranquillement passer leurs chemins, les autres seront aux anges. Les situations même ne manquent pas d'originalité, citons comme exemple ce combat contre des idéogrammes ( ! ) ou bien celui face à un gweilo zombifié (parlant anglais) !
Les acteurs interprètent leurs personnages avec compétences. Max Mok est un jeune premier classique mais efficace pour ce genre de métrages et les deux grands méchants (joués par Jason Pai Piao et Lau Suet Wah) ne manquent pas de styles. Particulièrement notable est le rôle donné à Yeung Jing Jing. Elle qui était souvent sous employée, trouve un vrai rôle ici, brillant à la fois dans l'action et dans son jeu.
Wu Xia coloré et nerveux, profondément distrayant, Holy Flame prouve encore une fois à quel point le réalisateur Tony Liu est un petit maître du genre. Logiquement ignoré par ses pairs à l'époque, il mérite d'être redécouvert aujourd'hui !