Harry,cardiologue juif new-yorkais,pourrait vivre une retraite confortable mais il a bizarrement préféré créer en Israël un élevage de porcs.Il ne donne jamais de nouvelles à sa famille,au grand dam de son ex-femme et de ses deux enfants,et il se lie d'amitié avec le rabbin local Moshe Cattan."Holy lands" est le dernier des trois films réalisés par l'écrivain et dramaturge Amanda Sthers,dont le scénario adapte son roman "Les Terres Saintes".Cette histoire était sans doute plus digeste sous sa forme romanesque,d'autant que la belle Amanda n'est pas très douée pour le cinéma.Cette coproduction franco-belge qui se déroule entre Israël et New York,avec un casting très international,souffre de la tendance de la réalisatrice à la pose,à la préciosité et à la prétention.Le film se concentre sur la famille Rosenmerck et la situation socio-politique israélienne mais s'éparpille dans un trop-plein de sujets traités superficiellement,ce qui donne paradoxalement une oeuvre où la vacuité prédomine.Sthers multiplie les plans magnifiques mais les fait durer au-delà du raisonnable,ses dialogues sont ampoulés et trop littéraires,les comportements des personnages sont peu clairs.Du coup,on n'entre jamais dans cette histoire à cause de ce style chichiteux qui provoque un ennui distingué.Il semblerait qu'il s'agisse d'un film très personnel,la cinéaste étant juive et ayant des attaches en Israël,et il est d'ailleurs le reflet de sa personnalité ambigüe,mêlant progressisme anglo-saxon et paranoïa israélite.La réflexion est donc confuse et oppose foi et athéisme,nationalisme juif et propagande pro-palestinienne,culture traditionnelle et laxisme moderne.Le tout est sous-tendu par la volonté de l'auteur d'être insolite à tout prix malgré la collection de clichés qu'elle utilise.Harry élève des cochons dans l'état hébreu,c'est moins problématique que si c'était en Arabie Saoudite mais c'est quand même mal vu.Cependant c'est avec le rabbin du coin qu'il sympathise alors qu'il va s'embrouiller avec le curé du village.Qu'est-ce à dire?Amanda insinuerait-elle que les juifs sont plus tolérants que les cathos?Quoi qu'il en soit,les tensions religieuses sont exacerbées par le fait qu'on est près de Nazareth,le berceau du Christ.Annabelle,la fille du héros,vient voir son père et se balade dans un pays sous tension où les tirs de roquettes du Hamas cohabitent avec les brimades infligées aux populations palestiniennes par les soldats de Tsahal.Qu'en penser?Chacun sait qu'Israël est un état illégitime pour certains et qu'il est condamné à la parano sécuritaire.La Guerre des Six Jours n'a pas duré six jours,elle n'a jamais cessé et continue encore aujourd'hui,entre attentats,tirs sporadiques et répression sauvage.Quant à la dimension familiale du film,elle repose sur l'incommunicabilité.Harry est parti s'isoler loin de New York et se mure dans la solitude.Annabelle vient le voir mais s'attarde en errant dans le pays sans prévenir son père,qui s'inquiète et le lui reproche alors qu'il est mal placé pour ça.David,le fils,dramaturge célèbre et gay,écrit régulièrement à son père qui ne lui répond jamais car il lui en veut d'être homo et de ne pas pouvoir perpétuer le nom des Rosenmerck.Parallèlement,le même David refuse de voir sa mère qui est en train de crever d'un cancer,apparemment parce qu'il ne supporte pas de la voir ainsi.Toutes ces attitudes sont peu compréhensibles mais on remarque qu'Amanda semble se projeter dans les personnages des deux enfants,David l'auteur star de théâtre et Annabelle la jolie fille curieuse et paumée.On peut sauver un enchaînement de plans magistraux,comme en apesanteur, sur une voiture avançant sur une route au milieu du désert et emmenant Harry et Moshe avec en fond sonore le génial "Many rivers to cross" de Jimmy Cliff,ainsi que les dernières scènes au moment du décès de Monica,qui provoquent enfin l'émotion trop absente du reste du film.La production bénéficie d'une distribution incroyable pour un petit film de ce genre,il faut dire que la directrice de casting,Bonnie Timmermann,est une pointure.On a là James Caan,impérial en vieil ermite versé dans la porcherie,un Tom Hollander au jeu très équilibré en rabbin plus cool qu'il n'en a l'air,une Rosanna Arquette bien conservée dont la présence est intacte,et la très belle israélienne Efrat Dor,convaincante en jeune femme à la recherche de la paix de l'âme.Jonathan Rhys-Meyers en fait en revanche un poil trop en homo à cran,et les séquences de la pièce post-moderne que son personnage a écrite sont des plus pénibles.Coprod française oblige,on voit surgir au détour d'un plan Patrick Bruel,pas là par hasard puisqu'il fut de 2004 à 2007 l'époux d'Amanda Sthers,Reem Kherici,actrice et réalisatrice issue de la Bande à Fifi,le journaliste et humoriste Raphaël Mezrahi et le bel Axel Kiener,le gynécologue de "Demain nous appartient".