Howard the Duck est connu dans l’histoire du cinéma pour être le plus grand ratage qu’ait jamais connu un studio hollywoodien. Le film remporte pas moins de quatre razzie awards (l’équivalent négatif des oscars) et accuse une perte sans précédent dans le portefeuille de George Lucas, son producteur. Demeuré longtemps introuvable, le film fait désormais l’objet d’un regain d’intérêt depuis que la scène post-générique des Gardiens de la galaxie a soulevé l’hypothèse qu’une nouvelle aventure du canard pourrait bien voir le jour. Trente ans après ce désastre financier, que reste-t-il de ce film renié par George Lucas qui a bien failli causer sa perte ?
Alors qu’il vit tranquillement sur sa planète peuplée de canards anthropomorphiques, Howard se fait soudainement aspirer par un gigantesque vortex qui le transfère jusqu’à la Terre. Seule solution pour regagner sa planète : mettre la main sur le canon laser détenu par la société « Dynatechnics ». C’est sans compter sur la présence de Nexus, monstre extraterrestre mangeur de chair, qui compte bien utiliser le canon pour faire venir d’autres de ses petits camarades sur la Terre…
Le film est une adaptation des aventures de Howard, un canard superhéros, dont le récit des exploits a été initialement publié en comics book Marvel. Pour transposer l’univers baroque et coloré de la bande dessinée originale, George Lucas n’a pas regardé à la dépense. Avec un budget de près de 30 millions de dollars (il n’en a rapporté que 20), le film se hisse gentiment au rang des grosses productions des années 80. La direction artistique, soignée, instaure une ambiance mi-polar, mi univers cartoonesque, posant ainsi des bases esthétiques que l’on retrouvera dans Qui veut la peau de Roger Rabbit, sorti un an après. Les aventures d’Howard se succèdent à un rythme trépidant, une péripétie en chassant une autre d’un battement d’ailes. L’ennui du spectateur semble ainsi être la bête noire des réalisateurs qui préfèrent enchainer les scènes d’action en limitant le plus possible les temps morts et les scènes de repos. En dépit de cela, Howard reste un bon divertissement, qui n’a pas à rougir de la comparaison avec ses grands frères L’aventure intérieure ou encore Willow.
Le véritable problème du film, et qui explique, à nos yeux, un tel désaveu lors de sa sortie, réside plutôt dans le choix ambigu du public auquel il semble s’adresser. Le film, tant dans sa narration trépidante que dans sa direction artistique déjantée, semble être a priori tourné vers un public familial. Le second rôle comique, les courses poursuites à la Tex-Avery, le happy-end de rigueur : les aventures de Howard auraient dû s’adresser prioritairement aux enfants. Or, le film crée une ambiguïté difficilement justifiable entre les aventures familiales qu’il relate et le ton salace utilisé pour les raconter. Les blagues sexuelles s’enchaînent, Howard ne cessant de jurer et de mettre sa main aux fesses des filles. Le tout atteint un paroxysme gênant lors d’une scène d’amour entre Lea Thompson (qui après l’inceste de Retour vers le futur n’était plus à une scène de zoophilie près) et Howard le canard. Et on ne vous parle pas du mini préservatif de Howard qu’un plan de caméra, rapide, mais tout de même parfaitement visible, montre dans son portefeuille…
Si Howard the Duck ne vaut pas sa palme de pire film de tous les temps, c’est bien grâce au savoir-faire de Lucas et Cie pour la narration hollywoodienne. Le caractère risible du film pointé du doigt lors de sa sortie est aujourd’hui compensé par le vent de nostalgie des années 80, qui nous fait pardonner bien des errances artistiques. Loin d’être un chef œuvre maudit, le film n’en demeure pas moins un bon divertissement du dimanche après midi, celui que l’on regarde en digérant son canard à l’orange.
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