Martin Scorsese a voulu faire ce film pour sa fille cadette. Ce genre d'intention est honorable, mais ça ne paye pas toujours, souvenons-nous du Oliver Twist réalisé par Polanski.
Mais là, il ajoute en plus son amour du cinéma, sa première réalisation en 3D, et même si c'est très éloigné de ce qu'on connaissait de lui, ça n'en fait pas moins un film extrêmement réussi.
Le film se base sur la fin de la vie de Méliès, quand celui-ci, première grande célébrité du cinéma, a du finir comme vendeur de jouets à la gare Montparnasse. Entre-temps, un enfant orphelin recherche ce qui devrait être le legs de son père, mais la collusion de ces deux personnes va faire d'énormes dégâts métaphoriques dans leurs entourages.
Tourné dans une 3D très bien utilisée, à tel point qu'on ne souhaite pas le voir en 2D car on sent qu'il a vraiment été pensé en relief, le film est Proustien à la fois dans la recherche du passé pour l'un et du temps perdu pour l'autre. Autour d'eux cohabitent les "habitants" de cette gare, dont le drôlatique Sacha Baron Cohen (dont je suis secrètement amoureux), qui a une vraie utilité et sait se montrer parfois émouvant, notamment quand il essaie de draguer la fleuriste.
Le film m'a aussi beaucoup plu car en tant que cinéphile, j'ai pu voir des films de Méliès sur grand écran, et rien que pour ça, je devrais vénérer Scorsese, mais cette vision ne parait pas pour autant fermée, elle sert à montrer à tous que le cinéma, c'est d'abord de la magie.
En parlant de magie, Méliès, qu'interprète très bien Ben Kingsley, paraît plus comme un homme du 19eme siècle que de son temps, car il semblait toujours considérer le cinéma comme un art forain, une attraction, en tout cas pas quelque chose de pérenne, ce que la fin du film va montrer de façon très émouvante.
Le film est au fond peu spectaculaire, excepté un cauchemar d'Hugo, où il se fait écraser par un train, ce qui provoque un déraillement, mais visuellement, c'est une splendeur, avec une sensation que les décors français de la gare ne sonnent pas faux, et comme je disais plus haut, une très belle utilisation de la 3D.
Sur un sujet dont on pensait que c'était très éloigné de Scorsese, ce dernier en fait au fond un film peronnel, où son amour du cinéma hurle (on assiste à un tournage d'un film de Méliès, et on découvre la façon artisanale comment c'était fait) de façon à en créer un éblouissement pour nous, les spectateurs.