… et pour toutes les autres espèces, Homo sapiens étant le seul être vivant de la Création à être « doué » de cruauté.
Un chat qui tourmente un souriceau se contente bêtement d’être un chat, une pie qui défonce le crâne d'une tourterelle se contente bêtement d’être une pie, des hyènes dévorant un éléphanteau vivant, un anaconda engloutissant un coati, un requin blanc croquant une tendre otarie, etc.


Question, d'ailleurs, aux personnes qui se pâment devant le spectacle de Mère-Nature : euh... vraiment ?! … Les couchers de soleil, les aurores (boréales ou pas), le vent dans les blés, le fracas des vagues, les volcans infernaux, la majesté des arbres, etc., bien sûr ! … mais pour le reste, des fourmis assaillant un lombric au baleineau et sa mère coursés par les orques.............................


En revanche, scier ou faire bouillir des prisonniers, crever des yeux, couper des langues, dépecer vivant des chiens (viverins, notamment : pour confectionner les bords poilus de vos atroces capuches), etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc. … c'est-à-dire infliger sciemment les pires des souffrances --- et parfois en jouir ! ---, voilà chose spécifiquement humaine.



– Eat.You eat deer all the time.



– I can't stop thinking about it. My brain just knows it's a baby.



– It's not a baby. It's food. It's meat. Please eat.



Le réalisateur canadien Shawn Linden met en scène une famille qui survit au cœur d'une forêt grâce notamment au piégeage, méthode de « chasse » cruelle s'il en est.


Ah ! Le piège ! La grande affaire d'Homo sapiens, où qu'il soit, de quelque époque d’où il grogne !
Les pièges à mâchoires qui broient les membres (membres que certains animaux sectionnent afin de recouvrer la liberté), les collets qui étranglent, les fosses bardées de pieux qui éventrent, la colle qui empoisse (spécialité d'abrutis du Sud-Ouest, notamment), etc.


Si les Mersault (Joseph, Anne et leur fille Renee) se nourrissent du gibier tué au fusil, ils peuvent aussi compter sur les sommes d'argent rapportées par le piégeage d'un castor (8$), d'un loup (175$) ou, jackpot, d'un glouton (300$), animaux dont la fourrure peut être achetée par le commerçant du « coin » (qui refuse les peaux de ratons-laveurs et de rats musqués).


J'ai cru comprendre que Shawn Linden voulait au départ marquer une distinction entre ces deux méthodes de prédation d'Homo sapiens : celle, acceptable, sur l'animal tué proprement (par balle) pour la nourriture et celle sur l'animal piégé non pour sa viande mais pour sa fourrure... ... jusqu’à ce qu'Anne tombe sur un lapin pris au collet ; lapin pépère, pas étranglé, pas stressé le moins du monde et qui se faire tordre le kiki par la femme des bois... qui fond alors en larmes.


Du coup --- comme on dit si abondamment dans les cours de récréation, les hémicycles et les ondes de France ---, mon interprétation du propos de Linden est validé, malgré les pleurs et le remords : la cruauté de l'Homme est sans équivalent.


Elle se confirme quand le policier doit abattre un ours attiré l'odeur de poubelles non-réglementaires d'un couple de petits crétins (inconséquence humaine entraînant la mort de Nounours), puis lorsque ce même flic se fait prendre un pied et un bras dans les crocs de gros pièges. On imagine la souffrance et le stress inouï endurés par les animaux ainsi prisonniers du métal savamment travaillé par Bourreau sapiens. Et si vous ne parvenez pas à l'imaginer, lisez ou visionnez...


Au Canada, la population urbaine a depuis une quinzaine d’années un mépris, voire un dégoût, grandissant envers ces ineffables connards qui s'adonnent au piégeage comme d'autres au tennis --- qui, l'hiver, à la tombée de la nuit, posent un collet et récupèrent le lendemain un renard et une martre congelés, morts d'épuisement et de froid pendant que les gros blaireaux ronflaient. Maintenant, parmi ces gens de la ville au grand cœur, on en trouve certainement beaucoup qui achètent leur petit steak bien propret sous cellophane, steak provenant comme partout de la production industrielle, grande génératrice de souffrance animale (comme tout le monde sait, mais loin des yeux, loin du cœur).



Lou y es-tu ?



Canis lupus --- l'une de nos légendaires terreurs (en Europe et en Amérique du Nord, en tout cas) --- malgré son organisation sociale, malgré son intelligence et son instinct diaboliques, craint l'Homme comme ce dernier la peste ou la foudre.


Aussi le loup qui rôde autour de la famille Mersault fait-il bien pâle figure dans ces bois épais où pourrissent … des cadavres humains.
Le responsable présumé ? Un certain Lou [!] qui a occis plusieurs campeurs, qui a trucidé Joseph et qui tuera Renee (sans doute après l'avoir violée).
La vengeance d'Anne, mère de famille survivante et devenue folle, sera terrible : elle pèlera le psychopathe comme un poivron au four...


Cette issue tristement putassière balaye les hésitations quant à la manière de considérer ce petit film longtemps malin mais qui s'avère surtout roublard, voire paresseux.


Car si Hunter Hunter séduit un temps par son discours, sa fluidité et son suspense, le parti pris --- crucial --- de l'ellipse


mort de la chienne, mort des campeurs, mort de Joseph, mort de Renee


, censée instiguer le malaise, finit par poser question et même par lasser et frustrer.


Le dénouement gore n'arrange rien, bien au contraire. Il met en évidence les excès de suggestions.
Rétroactivement, ces ellipses deviennent évitement et ricochent sur un propos animalisto-écolo qui tombe à l'eau. On a bien failli se faire avoir...

Arnaud-Fioutieur
5

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le 1 août 2021

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