... et vos paupières sont lourdes, vous êtes détendu, vous êtes au bord d’une plage de sable fin et blanc, le rythme des vagues vous berce, vous êtes détendu et surtout VOUS ECOUTEZ LE SON DE MA VOIX qui vous berce, comme l’ondulation des vaguelettes qui épousent langoureusement la grève, vous êtes bien, et vous êtes détendu, vous regardez un film avec Ben Affleck, vous êtes détendu, vous suivez Danny (Ben Affleck) qui a la mine déconfite, et qui vous indique par cette attitude que son personnage se remet d’un trauma, il a donc le regard d’Usul privé de manif pro Palestine, car sa fille a disparu dans des conditions étranges. La psy de la police voit bien qu’il est à deux doigts de se faire sauter le caisson avec son arme de service dans les chiottes du comico, mais elle le juge bon pour le service.
Ce n’est pas grave, car vous avez confiance, vous écoutez le son de ma voix, toujours sur la plage, vous suivez Danny, qui tente d’empêcher un braco, vous êtes ouverts à toutes les idées, même celles mettant en scène un hypnotiseur qui dicte des consignes par télépathie. Les événements tous plus invraisemblables les uns que les autres s’enchaînent à un rythme soutenu, comme ce plan incroyablement complexe de l’hypnotiseur pour récupérer le coffre de la banque, tout ça pour finalement déguerpir à grandes enjambées comme un héros d'Hanna Barbera. Mais vous êtes bien quand même, parce que vous écoutez le son de ma voix, et le sable blanc et chaud vous fait du bien, vous êtes détendu et ma voix vous berce, elle vous berce même quand Ben adresse des regards comiques à son collègue / cliché vivant et qu’il vous procure un frisson malaise dans l'échine, où bien à l’inverse fait surgir un éclat de rire lorsqu’il tente d’émouvoir, mais tout cela vous est égal car vous écoutez ma voix, elle vous berce et vous fait passer le désagréable sentiment d’accorder votre temps libre à un téléfilm des années 90, avec sa romance poussive entre Danny et Diana Cruz (Alice Braga), une sorte de Blanche Gardin Brésilienne, également hypnotiseuse de son état.
Ma voix vous protège de tout, elle vous protège de l’agacement vis à vis de Robert Rodriguez qui plagie comme un gougnafier des effets visuels d’Inception, vous êtes bien quand même, vous pensez que c’est un “Nolan qui sent dessous les bras”, et vous avez raison, vous écoutez ma voix, et si vous pensez que c’est plus proche de Now you see me 7 vous aurez tout autant raison...
Danny rencontre des personnages troubles, beaucoup sont des menaces de Dellrayne (William Fichtner, le méchant de Prison Break saison 2) un puissant hypnotiseur, et quelques scènes se résument à une grande partie de cache-cache, ou d’hypnotise moi si tu peux (la fameuse scène chez le copain de Diana, où tout le monde s’hypnotise à tour de rôle avant de prendre la fuite devant la menace d'une Winchester) ... D’autant que les règles sont floues, selon Diana, Danny dispose d'un bouclier mental exceptionnel contre l’hypnose, mais tout ce qu’il voit est faux sans qu’il ne se rebelle contre les explications bancales de son accompagnatrice... Mais ce n’est pas important, car vous écoutez ma voix et vous savez que vous n’êtes pas devant un Nolan...
Au bout de 60 minutes de joyeux non-sens et d’un nombre de clichés enchaînés encore plus important que devant un photomaton de la gare st Lazare, vous apprenez enfin la raison de cet agrégat d’invraisemblances : tout ce qui s’est déroulé depuis le déb... Au fait j’ai oublié de vous rappelez que vous écoutez LE SON DE MA VOIX, et que vous êtes bien et cool et décontracté du gland, voilà désolé de le rappeler mais je veux pas que vous vous réveillez désorienté, fin de la “parenthose”. Si rien ne tient depuis le début, et que l’on peut même juger l’ensemble de profondément merdique, c’est parce que c’est fait exprès ! Enfin, disons que c’est un scénario cliché orchestré avec tous les personnages, car il vise à faire accoucher Danny d’un secret qu’il garde suite à un reset du cervelet : la localisation de sa fille disparue, qui s’avère être l’hypnotiseuse la plus balaise du monde, et qui constitue une arme redoutable pour des gens mal intentionnés, pour ne pas dire malhonnêtes.
Dellrayne, Diana, le collègue et les 40 membres de l’organisation affublés de vestons de vendeur Darty, tous se sont lancés dans un grand “prank” psy. Entre le Grand Bluff de Patrick Sebastien et une consultation de Gérard Miller - mais sans les agressions sexuelles - pour faire cracher la Valda à Danny. Ouf, on respire, ça veut dire que Robert Rodriguez va réussir son numéro ?
Mais vous écoutez la vague de ma voix, sur une plage de son, vous êtes bien, quand je dirai "un, deux trois", vous vous réveillerez, mais pas maintenant, parce qu’il faut aborder la fin du film, qui ne tient pas plus la route qu’une voiture conduite par Pierre Palmade : la fuite de Danny, il s'agit encore d'une fausse réalité mal branlée et inutile (la maison à la campagne verdoyante était en fait ... Une maison délabrée dans une carrière ! Twist important dans l'optique d'avoir une info ? On ne sait pas, mais le spectateur est sur le cul !).
La fusillade fait passer celle de Savages d’Oliver Stones pour du Tarantino. Et étant donné qu’on ne croit plus à rien de ce que l’on voit ou entend, les morts par balles des parents adoptifs de Danny ne provoquent qu’un bâillement poli, tout comme la révélation de la véritable déconditionnement (celui de Diana).
Danny, Diana et Jean Grey font une accolade car ils ont empêché que le pouvoir de la gamine ne soit employé à semer la violence (devant les dépouilles de 40 personnes !). Postgénérique, le méchant Dellrayne prouve qu’il est plus fort que Sylvain Mirouf puisqu’il a réussi à décaniller le père adoptif de Danny, de quoi laisser de l’espoir aux gens sous l’emprise de Rodriguez qu’une suite est possible...
Vous êtes mal, vous avez passé 1h20 interminable avec des rebondissement tirés par le man bun, des acteurs non dirigés, et des idées mal pompées sur Hitchcock, Fincher et Nolan dont la réalisation fait plus penser à Régis Roincard ou Louis Letterier, mais vous écoutez ma voix, et vous êtes prêts à émerger d’un songe nanard, quand je dirai les 3 mots magiques, vous aurez tout oublié, et vous serez détendu, vous écoutez les vagues, vous écoutez ma voix, UN, DEUX, TROIS, RÉVEILLEZ VOUS !
Ça fait 12 euros la séance.