Plus de 300 critiques sur SC. Toutes élogieuses. La moyenne de mes éclaireurs est à plus de 9/10. Que viens-je faire dans cette galère ?
Peut-être, pour y apporter quelque nuance.


D'abord, il faut situer ce film de Sergio Leone qui venait de réaliser "la trilogie du dollar" entre 1964 et 1966. Ces trois westerns "spaghetti" constituaient déjà une évolution du genre.
Alors que ces trois westerns furent tournés en Espagne, les scènes extérieures furent tournées à proximité de Monument Valley, ce qui, pour les américains, pouvait passer pour de l'intrusion.
Alors que les westerns de la trilogie avaient un côté parodique certain, "Il était une fois dans l'Ouest" se voulait être une histoire sérieuse et avait l'ambition de rivaliser avec le western classique avec un autre regard.


Le scénario de ce western comporte deux histoires qui s'imbriquent l'une dans l'autre : la première, explicite, est la rivalité entre la compagnie de chemin de fer et le propriétaire d'une terre comportant le seul point d'eau de la région, enjeu de l'arrivée du chemin de fer avec création d'une gare et d'une ville. La deuxième qu'on devine peu à peu est une vengeance entre deux hommes.


Si j'essaie de prendre de la hauteur sur le scénario, on peut dire plusieurs choses.
L'arrivée du chemin de fer dans une région se traduit par une épreuve de force pour acquérir les terres nécessaires et en imposer la construction. L'entrepreneur s'acoquine avec des gangsters qui sont là pour acquérir au plus bas prix et par la violence ce qui est nécessaire à l'avancement du chantier. Dès lors que le chemin de fer sera là, on change de registre et tous ces gangsters seront appelés à disparaître au profit d'autre chose, par exemple, la civilisation et la loi. Dans le film, c'est clair, les bandits ne se transforment pas en gens honnêtes, ils meurent. C'est une autre catégorie de gens qui s'installe et qui fera avancer / prospérer la société.
Un autre point important, c'est la présence centrale d'un personnage féminin Jill (Claudia Cardinale) qui connaîtra l'avant et l'après. C'est le seul personnage qui survit et qui a un rôle précis (social) dans l'après. Même Harmonica (Charles Bronson) qui survit lui aussi s'effacera du paysage après un dernier regard sur la société en construction.
On peut s'interroger sur la réalité physique du personnage d'Harmonica qui semble intouchable (ou se remet très vite d'une grave blessure). Il arrive d'on ne sait où, est parfaitement énigmatique pour tout le monde, a à accomplir une mission de vengeance et à la fin, disparaît.
Pour ce qui concerne la mise en scène ou la réalisation, le film est indéniablement une réussite. Je passe sur les séquences d'ouverture du film (Jack Elam avec sa mouche, Woody Strode avec la goutte d'eau sur son chapeau, etc) qui crée une ambiance mais tous les plans sont effectivement très travaillés (le train avec l'approche des cavaliers, le déploiement des gangsters dans la scène de la ferme McBain, etc) . Le découpage et les transitions entre les scènes sont irréprochables. Un exemple, qu'on peut très bien généraliser, c'est la scène entre Morton et Franck qui se termine sur le nom prononcé de Jill McBain qui se poursuit par une scène avec Jill McBain.
Toutes les techniques possibles de cadrage ont bien dû être mise en œuvre : plongée, contre-plongée, gros plan, archi-gros plans etc
Le casting est de très bon niveau
Claudia Cardinale est magistrale dans son rôle de femme qui a beaucoup "vécu" et qui veut survivre mais pas n'importe comment.
Henri Fonda en inhabituel méchant, complètement à contre-emploi, s'en tire très bien dans son rôle de bandit psychopathe qui cherche à prendre de l'emprise sur son employeur affaibli par une maladie évolutive et handicapante. Mais il n'est qu'un bandit et pas un homme d'affaires.
Jason Robards dans son rôle de Cheyenne, bandit évadé, injustement accusé. Au fond, il n'est pas si méchant que ça et d'ailleurs, c'est un des rares bavards du film. Le bandit romantique !
Charles Bronson, en personnage énigmatique, un des rares à sourire, traverse efficacement le film de part en part. Est-il réel ou est-ce un esprit divin chargé de rétablir l'ordre ? J'ai dit qu'il avait une mission personnelle à accomplir mais il conjuguera sa mission avec la défense de la veuve, Jill McBain.
La musique ? Ennio Morricone signe certainement une des musiques de film les plus connues qu'il ait composées. Parfaitement adaptée aux différentes scènes.


Et pourtant, je n'apprécie pas plus que ça ce film !
J'ai vu ce film pour la première fois vers l'âge de vingt ans voire plus et j'étais précédé par son immense réputation. J'en attendais peut-être trop. Ceci m'est arrivé d'autres fois avec d'autres films dans le même contexte.
Des longueurs et des longueurs. Des scènes pour mettre dans l'ambiance, ok mais quand même. Des personnages grotesques comme le chef de gare au début qui fait dans son froc ou comme d'autres, en général des petites gens, des personnages secondaires. Je suis toujours agacé par ces partis pris ou ces clichés sur les gens "pas dans les canons de beauté" ou un peu "épais" et qui sont ridicules, juste pour faire relâcher la pression du spectateur.
Surtout, même si les personnages sont superbement interprétés, ils sont des individualités qui se côtoient les unes les autres sans finalement s'interpénétrer ou si peu. C'est peut-être le fait qu'on ne sait rien d'eux que le peu qu'ils en disent.


Leone a fait un film super esthétique, techniquement parfait avec une histoire qui se tient, qui est intéressante avec des acteurs talentueux. Le film est baigné dans une musique de légende, que l'on retrouve partout ailleurs.
Mais j'ai eu du mal à trouver l'âme du film, surtout l'âme des personnages.

JeanG55
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le 22 oct. 2021

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JeanG55

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