C’est à travers une reconstitution flamboyante que Xavier Giannoli fait renaitre l’œuvre d’Honoré de Balzac en adaptant l’un des romans clé de son imposante Comédie Humaine. Il emprunte pour cela un ton résolument moderne sans pour autant dénaturer l’œuvre.
Sa réalisation dynamique capture l’effervescence d’une époque qui voit naître les prémisses du capitalisme et avec lui l’essor de la presse d’opinion dans un contexte politique trouble où s’opposent libéraux et royalistes.
Les intrigues, nombreuses mais solides, n’encombrent pas l’histoire de l’ambitieux Lucien de Rubempré, au contraire, elles l’enrichissent. Illusions Perdues est une satire à la fois jouissive et cruelle, où compromissions, alliances, trahisons et hypocrisie se mêlent dans un jeu de dupe et de pouvoir.
Une voix off rythme le récit. Bien loin de le plomber par trop d’académisme, elle le rend pleinement vivant. Et l’idée de la confier à Xavier Dolan est un coup de maître, sa diction parfaite et son élocution élégante rend la narration passionnante. L’acteur est par ailleurs excellent quand il incarne Nathan d’Anastazio à l’écran, c’est sans doute son meilleur rôle à ce jour. Tout le casting est au diapason, inspiré et pleinement concerné. Mention particulière à Jeanne Balibar, Vincent Lacoste et Louis-Do de Lencquesaing. Mais la star, c’est bien Benjamin Voisin. Le jeune acteur porte crânement le film sur ses épaules et offre une interprétation juste et nuancée de Lucien. Depuis Eté 85, il est sans doute l’acteur le plus prometteur du ciné français.
Ces Illusions Perdues sont donc une franche réussite, et rassure sur la capacité du cinéma français à adapter avec vision et ambition ses grands auteurs. Le succès public du film lui donne raison.