In a Heartbeat est le premier court-métrage dont je fait la critique, j'ai pris cette décision suite à un débat sur SensCritique concernant le film et l'engagement en générale dans le monde du cinéma. Je ne vois aucun souci à ce qu'un film soit militant d'une cause -bien au contraire- du moment que cela est fait intelligemment, est adapté à la capacité de raisonnement de l'âge du public visé et ne viol pas la réalité de certaines situations. In a Heartbeat ne remplie selon moi pas tout ces objectifs mais le message principal qui est l'amour passe bien et l'émotion est quasi garantie et c'est l'essentiel. J'explique tout ça en détail.
Attention, cette critique comporte de nombreux spoilers !
Je commencerais par dire que ce court-métrage est très émouvant de par ses personnages et sa bande originale. En effet la musique du film est très belle et plus particulièrement, les partitions de piano sont super touchantes, correspondent bien à l'atmosphère. En dehors de la bande originale, les personnages sont également émouvants : les maladresses du timide protagoniste roux sont assez drôles, son isolement à la fin du film est déchirante et la bienveillance du protagoniste brun est touchante. En général, les films d'animation qui réussissent à m'émouvoir sont des Pixar donc ça m'a fait penser à un court-métrage d'animation Pixar car c'est tout aussi mignon, vraiment !
L'animation est de plus très jolie pour un simple court-métrage de 4 minutes, à tel point que ça arrive d'un point de vue visuel clairement à la cheville de certains long-métrages d'animation de grosses productions.
C'est sur l'efficacité du côté militant que je suis plus mitigé. Commençons par un point positif, l'homosexualité est ici très bien normalisée ; dans la façon dont j'ai compris le film, le message principal c'est l'amour. Les sentiments du personnage principal sont symbolisés à travers son petit cœur qui bat puis se ballade, c'est original. Ils sont désignés comme des ressentis normaux dont il n'a pas à avoir honte. A la fin d'ailleurs, c'est l'amour qui prime sur le rejet et le mépris des autres. De cette façon, ce film est aussi une lutte contre la haine envers les homosexuels qui pourtant s'aiment comme tout le monde. Donc l'objectif final est acquis mais les moyens pour y parvenir me laissent perplexe.
Il y a en effet des maladresses d'ordre simplificatrices dans l'écriture pour l'histoire, si on l'interprète au sens stricte. Le film fait un peu croire que si le pré-ado est amoureux de l'autre garçon, il doit absolument lui faire part de son amour même devant tout le monde , qu'il doit se laisser guider par son cœur et jamais sa tête quitte à un peu harceler le gars (ne pas avoir à avoir honte ne veut pas forcément dire faire n'importe quoi sans réfléchir) ; qu'à la fin il va se forcément retrouver tout seul car sa différence ne serra "surement" pas acceptée par les autres mais au moins il sera avec son coup de foudre qui aura forcément une attirance réciproque... C'est malheureusement comme ça que je comprendrais le film si j'étais un enfant alors que le message principal c'est l'amour comme je l'ai dit dans mon précédent paragraphe. Il y a en effet un manque de nuance : dans la vraie vie, il faut aussi réfléchir avec sa tête car même chez les hétéros on évite de faire une déclaration d'amour à quelqu'un devant tout le monde (car même si ça se passe pas exactement comme ça, c'est ce qui est suggéré ici) afin de ne pas mettre l'autre mal à l'aise et de ne pas se faire humilier devant toute l'école. Dans la vraie vie les pré-ados sont des moutons et sont particulièrement méchants donc si le personnage va faire sa déclaration publique à un autre garçon en réalité hétéro, celui-ci va se montrer dans 95% des cas verbalement homophobe voire violent physiquement pour affirmer qu'il "est dans la norme" ; et même s'il tombe sur un autre garçon bisexuel ou homosexuel, celui-ci n'est pas forcément prêt -ni obligé d'ailleurs- à faire son coming out devant toute l'école, surtout durant la période du collège où les gens sont méchants comme je l'ai dit ; de plus il n'aura pas forcément de sentiments réciproques même s'il a la même orientation. Enfin dans la vraie vie, ce n'est pas parce qu'on a une attirance pour quelqu'un que cette personne aura la même orientation sexuelle et va nous tomber dans les bras, la fin est donc un peu bisounours. Certes c'est un film d'animation mais un film d'animation militant donc un minimum de réalisme par rapport aux situation de la vraie vie est de rigueur ; de plus la tranche d'âge visée qui n'a pas forcément un esprit critique approfondi pourrait à travers le développement irréaliste de la relation entre les personnages prendre trop à cœur le message sur l'amour qui est simplement que l'homosexualité, même si certains y son hostile n'a rien d'honteux, et très mal l'interpréter au final. L'excuse qu'on peut donner à ce scénario qui manque de nuance, c'est la durée du film : 4 minutes, c'est beaucoup trop court donc on est obligé de simplifier. Je pense ainsi que le principal problème de ce film est sa simplification de la réalité.
Ou alors on peut interpréter de façon plus souple. L'hypothèse qu'on peut faire du film et que les deux personnages vivent une histoire d'amour mais qu'ils se cachent des autres à l’extérieur et à l’intérieur de l'école ; mais que ce secret est assez insoutenable pour le personnage roux et un jour ils se font surprendre par incident au collège... donc le personnage principal fuit par honte mais son ami ne le laisse pas tomber car l'amour est plus fort que tout. Mais cette interprétation n'est qu'une hypothèse, une interprétation personnelle et les pré-ados n'ont pas forcement un esprit critique développé pour me répéter encore une fois. Et puis, vu la timidité et la méfiance personnage roux envers son ami, il est difficile de croire qu'ils étaient déjà en couple. J'avoue que je ne sais pas quoi penser des moyens utilisés.
In a Heartbreat est un film techniquement bien réalisé qui de plus s'avère très touchant à travers ses personnages et sa bande originale. Côté militantisme, le message concernant la normalisation de l'homosexualité passe ; mais malheureusement même si c'est pas honteux, le personnage principal se met dans des situations qui dans la vraie vie n'iraient pas à son avantage, ni à celui de son coup de cœur (déclarer son amour à quelqu'un du même sexe devant tout le monde) ou n’arriveraient pas forcément (que son coup de foudre ait la même orientation sexuelle que lui). On peut interpréter mais ce ne sont que de simples hypothèses et un jeune public est-il capable d’interpréter quand j'entends des gamines de douze ans dire devant la file d'attente au ciné "j'ai vu le premier, c'était tellement romantique, allons voir la suite" en parlant de 50 Nuances plus Sombres ? Bof. Personnellement, je vous cache pas que l'émotion procurée a quand même pris le dessus sur les défauts de l'écriture qui en 4 minutes ne pouvait pas donner une histoire animée qui tient debout dans son développement pour un sujet aussi sensible, même en 2017 malheureusement.