Toujours étonnant de constater que, sans le vouloir, de certaines soirées se dégage parfois une thématique. Ce soir, après Searching for Sugar Man, c'est l'Afrique du Sud qui s'invite à la maison.
In my country est un bon film, porteur d'un message difficile.
La gravité et la force de son sujet exacerbent ses défauts.
Mais ces derniers ne doivent pas faire oublier qu'il accomplit une mission cruciale, le devoir de mémoire.
Loin de moi la volonté de monter sur des chevaux bien trop grands, mais je dois à la vérité de reconnaître combien ce récit m'a touché.
Il est important, il est essentiel de perpétuer le souvenir des atrocités commises dans l'Histoire. À défaut d'empêcher complètement la répétition des mêmes erreurs, cela obligera au moins à assumer nos responsabilités, à ne pas, à ne plus pouvoir prétendre qu'on ne savait pas.
Les œuvres d'une telle portée m'incitent souvent à réécouter Né en 17 à Leidenstadt de Fredericks Goldman Jones. La question peut paraître grandiloquente et démago, surtout si l'on cherche à éviter d'y répondre : qu'aurais-je fait à leur place ?
Boorman nous interroge sans relâche au fil de sa narration. Cette question lancinante, ainsi que celle de notre capacité à pardonner, ne doit pas éclipser la réalité des horreurs perpétrées.
Malheureusement, si le spectateur ne s'en charge pas, c'est le réalisateur qui commet occasionnellement l'erreur de diluer son propos.
J'ai trouvé particulièrement maladroite, artificielle et superflue la trame amoureuse entremêlée à l'histoire principale. Non que cela me gêne de regarder deux acteurs s'embrasser, rassurez-vous je suis un grand garçon maintenant, mais c'est amené de façon tellement pataude, et le message sous-jacent est si peu subtil que je m'interroge sur les intentions de Boorman ici.
Je ne prétends pas que l'on doive nécessairement s'infliger deux heures entières de souffrance ininterrompue pour que la leçon s'imprègne davantage, mais il est bien trop évident qu'il a cherché à atténuer le choc pour l'audience, et l'immersion comme l'impact en sont effectivement et efficacement diminués. C'est presque ce qui m'a mis le plus mal à l'aise, tant c'est mal utilisé.
En dehors de cela, l'exercice est quelque peu scolaire mais de bonne facture. De la mise en scène aux acteurs, il n'y a pas grand-chose qui déborde, jusqu'au dénouement un tantinet frileux de la confrontation avec le mari bafoué, qui se pose en parallèle auto-déclaré des auditions. On a vu plus habile, là encore.
Je peux paraître acerbe et sévère avec ce film, pourtant je lui reconnais de nombreuses qualités, dans l'objectif qu'il poursuit comme dans son exécution.
Si je lui fais des reproches, c'est parce qu'il m'a bouleversé et que j'aurais aimé le voir aller plus loin encore.
Indépendamment de ces considérations, je ne saurais que trop vous conseiller de le voir, parce que c'est notre monde et notre patrimoine, c'est bien là l'une des morales les plus vraies qu'il répète et inculque. Et que ce n'est pas très éloigné de nous, que ce soit dans l'espace ou dans le temps.
D'ailleurs :
- j'ai appris ce que signifie Ubuntu
- on voit Juliette Binoche prise en sandwich entre deux noirs (dont Samuel L. Jackson) et qui dit "Do me"
Vous ne trouverez cela nulle part ailleurs.
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