Inferno
5.1
Inferno

Film de Ron Howard (2016)

La réputation de Dan Brown, auteur de romans à suspense mondialement connu, n’est plus à faire. Surtout depuis que deux de ses livres, Da Vinci Code et Anges et Démons, ont été adaptés au cinéma par Ron Howard. Le premier m’avait moyennement convaincu, mais le second m’avait beaucoup plu. Les puzzles et énigmes sont une spécialité chez Dan Brown, et jusqu’ici, Howard était parvenu à plutôt bien rendre justice aux écrits de l’auteur. Il y a trois ans, lors de la parution d’Inferno, je m’étais plongé dans la lecture de ce roman, qui m’avait, pas la même occasion, bien convaincu. Quid, alors, de son adaptation cinématographique, en salles depuis une semaine ?


Le film n’est pas mauvais. Mais il est loin d’être exempt de tous reproches. Mené tambour battant, il déverse au spectateur un flux continu d’images et des successions de plans montés de manière effrénée, quasiment difficiles à supporter. A la manière d’un Taken 3 (que j’avais peut-être un peu trop louangé à l’époque), il fait du montage une arme destructrice qui assouvit le désir du spectateur d’en prendre plein les yeux. Tel un authentique film d’action hollywoodien, qui ravira sans aucun doute les amateurs de sensations venus dans la volonté de s’extirper de leur quotidien, il ne s’arrête jamais. Mais ce n’est pas ce qui était attendu de la part de ce film.


En effet, Inferno se trompe totalement dans la manière dont il doit traiter son sujet. Le livre, très immersif et prenant, propose une vraie chasse au trésor dans l’Italie de la Renaissance, à travers l’exploration des écrits de Dante Alighieri (La Divine Comédie) et du patrimoine historique italien. L’intrigue est construite de sorte que le spectateur s’interroge, développe sa culture, et n’est pas directement mis devant le fait accompli, l’auteur ne dévoilant ses meilleures cartes que vers la fin du livre. Dans le film, c’est tout l’inverse. Le plan de l’antagoniste, un milliardaire misanthrope, est dévoilé dès les premières minutes, et même dans la bande-annonce. Sur ces bases, le film ne peut s’avérer que convenu et relativement prévisible.


Le second inconvénient principal concerne le ton choisi par le réalisateur pour mettre en scène son film. Alors que tout l’intérêt du roman résidait dans la complexité des énigmes et leur résolution, ces points sont relégués au second rang dans le film. Les différentes étapes permettant à Robert Langdon de progresser dans sa quête s’enchaînent très vite, de manière très stéréotypée, empêchant le spectateur de profiter de la richesse créative qui émanait du roman.


A la place, le film Inferno est concentré sur les menaces de complots qui pèsent sur Langdon et l’objet qu’il a découvert. Le film s’avère guidé par l’ambivalence permanente dont font preuve les différents personnages, et les nombreux twists qui en découlent. On n’est finalement plus amené à explorer les écrits de Dante ou à sillonner les rues de Florence et les siècles d’Histoire, mais davantage à parler de conflits d’intérêt, de plans machiavéliques et excessivement retors, qui ne manquent pas de parfois faire grincer des dents.


Il est vrai que l’on peut souvent questionner la légitimité des comparaisons entre les films et les livres dont ils ont été adaptés, car, souvent, le livre est la matière brute et est difficilement adaptable dans son intégralité. Cependant, la comparaison entre Inferno le livre et Inferno le film permet de largement relativiser la qualité de ce dernier et de nourrir une certaine frustration à son égard. Sans tout traiter de A à Z, il aurait pu aller plus loin. Le fait d’avoir lu le livre me fait saisir tout le potentiel que laisse échapper le film, qui choisit de prendre la forme d’un divertissement hollywoodien lambda, reprenant tous les codes classiques que nous servent aujourd’hui toutes les grosses productions américaines. Un choix libre, mais pas le bon.


En termes d’adaptation, le film ne fait pas honneur au livre, éludant certaines de ses composantes, parfois même très importantes. La sensation que l’on a à l’issue de la séance est que le film a été réalisé pour toucher le public le plus large possible et faire tourner la planche à billets. Inferno n’est pas mauvais, mais, à mes yeux, il passe à côté de son sujet en ne respectant pas assez la structure du livre et de mauvais choix scénaristiques ont été pris, transformant ce qui devrait être un film d’aventure et d’histoire en un film d’action hollywoodien classique. Il réussit donc, et satisfera les plus tolérants, mais, tout de même, attention à ne pas prendre les spectateurs pour des idiots.

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le 19 nov. 2016

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JKDZ29

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