Après le décrié Boulevard de la Mort, qui ne s'apprécie pleinement qu'intégré à la pellicule de Grindhouse, Tarantino s'est lancé avec un enthousiasme évident dans son western sur trame de seconde guerre mondiale pleine de nazis.
Inglourious Basterds est un film Tarantino jusqu'au bout des échantillons pelliculaires. Tout y est. La violence, les personnages forts en gueule, la BO composée de titres cultes avec un emprunt toujours plus affirmé à Ennio Morricone, un découpage de son histoire en chapitres, un méchant charismatique, des femmes prédatrices, le long travelling embrassant la perspective d'un décor avant l'action, les pieds d'une actrice en gros plan, les jurons, les armes improvisées...
Mais comme à chacun de ses films, Tarantino innove et propose à son public un "petit quelque chose de plus". Dans le cas d'Inglourious Basterds, c'est l'emploi à dessein de quatre langues à l'écran. Il ne s'agit cependant pas d'esbroufe propre à élever l'ego du spectateur moyen "Ouais, moi je vais voir un film avec des sous titres !".
Ce qui me semble important de souligner, tout de même, c'est que le passage d'une langue à l'autre n'est jamais gratuit. Il s'agit d'un élément moteur dans la trame scénaristique. Les incompréhensions et/ou connivences entre les personnages s'articulent sur la compréhension ou non de leur interlocuteur.
Ainsi, les Dreyfus sont piégés de ne savoir parler que français, les Basterds sont repérés sans problème par le "Jew hunter" de ne pas savoir articuler un mot d'italien correct, le cinéphile britannique n'a pas un accent capable de dissimuler ses origines. Tarantino va même plus loin dans son cas, avec la mise en lumière d'une gestuelle simple pour désigner le chiffre trois qui diffère d'un pays à l'autre.
Ce qui ressort finalement de cet enjeu polyglotte, c'est que nos Inglourious Basterds sont de belles bêtes brutasses, complètement dépassées et roulées par le colonel SS Hans Landa, d'un verbiage réjouissant, fin manipulateur, passant d'une langue à l'autre pour arriver à ses fins. La vengeance mesquine dont il fera l'objet rehausse la perfection de sa machination opportuniste... Déployée après une erreur de prononciation en italien de son adversaire butor.
Dans Inglourious Basterds, Le verbe polyglotte et la connaissance culturelle de l'adversaire surclassent la brutalité crasse. En ce sens, ce film rejoint la perle rare Jackie Brown, où la cervelle et la connaissance sont les armes maîtresses, la brutalité un expédient.