Régulièrement, j'aime à revoir ce film, j'aime la première heure, vraiment, je la connais presque peur* et chaque fois, je le regarde avec le même plaisir, la même terreur, la même incompréhension, la même admiration. Régulièrement, quand il est très tôt le matin et que je ne suis pas encore couché, régulièrement quand il y a quelqu'un avec moi et qu'on ne sait pas quoi regarder, mon regard se porte sur Inland Empire.


Ce film est beau, indéniablement, même sa laideur est mise en scène avec quelque chose de grandiose. Les corps aux visages floutés, les rires enregistrés de la sitcom des lapins, les gros plans affreux sur les visages de la sorcière-voisine, les figures qui semblent se décomposer de vert, de gris, de policier, spécialement sale, et de la fille au tournevis, ou même l'interview ! Je regarde ce film sans un mouvement que mon tremblement, en état de choc.


Régulièrement, je m'endors pendant la deuxième partie, qui devient le métronome de mon demi-sommeil. Je suis réveillé par les cris, les lumières, et il y a ces chansons presque pop ou la voix de Lynch qui chante - et j'aime Lynch quand il chante - What love does ? Et cet univers de cauchemars me berce, doucement, tendrement.


Je ne regarde jamais la troisième partie, à force, je crois même que je l'ai oubliée. Mais ce n'est pas vraiment important. Je ne me passionne pas pour l'analyse de l'histoire. J'aime l'esthétique, j'aime l'ambiance, et je n'ai pas vraiment d'idées à développer. Oh, et j'aime terriblement Laura Dern et le beau gosse tellement rebelle, et la mère de Laura Palmer ! Et ces deux anglais qui viennent tourner le film.


Je me demande parfois, même si j'y pense à chaque fois, à quel point la drogue influence la perception de Lynch. On s'dit souvent, c'est un film de toxico quand c'est bizarre, mais souvent, ça ne l'est pas vraiment, ça ne ressemble pas vraiment, alors qu'ici, c'est terrible de ressemblance : ces points de vue internes sur les mains tendues, mouvantes, ces déformations permanentes des visages, de leurs couleurs, ces effets de lumières, ces sons qui se glissent, la réapparition des détails, allez savoir à quel point mon cerveau essaye juste de faire les liens, tout ce dernier passage est peut être à supprimer.


Quoi qu'il en soit, il y a ce visage, qui revient, cette jeune fille, si belle, qui pleure devant sa télé, allumée, éteinte, ne reflétant que son visage magnifique d'où coulent quelques larmes grandioses, les plus belles ; chaque fois que je revois ces images, je le sais, et un frisson me parcourt tout entier.



  • Comprenez "par coeur", et rajoutez-y une bonne couche d'inconscient.

Créée

le 19 juin 2012

Modifiée

le 31 juil. 2012

Critique lue 4.8K fois

90 j'aime

28 commentaires

J. Z. D.

Écrit par

Critique lue 4.8K fois

90
28

D'autres avis sur Inland Empire

Inland Empire
Sergent_Pepper
7

Empire likes back

Aborder l’Empire intérieur exige du spectateur de nombreuses qualités, et poussées à un extrême auquel il n’est pas coutumier : patience, endurance, lâcher prise, tolérance, voire indulgence seront...

le 11 juin 2017

73 j'aime

3

Inland Empire
Extraphile
10

Aux frontières du dilemme de notre Empire Intérieur

Inland Empire, représente l’apogée du travail de Lynch, d’un point de vue de la réflexion de l’âme, de la description du jeu permanent entre le réel et le subconscient, et bien d’autres thématiques...

le 3 août 2014

54 j'aime

14

Inland Empire
B-Lyndon
10

Something is happening.

J'ai donc vu Inland Empire hier, et je n'ai immédiatement pas pu en parler. Signe que quelque chose s'est passé. Le jour d'après, c'est difficile de dire quelque chose de construit à propos du film...

le 18 mai 2015

40 j'aime

66

Du même critique

Malcolm
JZD
10

Critique de Malcolm par J. Z. D.

Francis qui veut pas travailler ! La peluche bleue qui parle à Dewey, et Reese pom-pom-boy ! Les microbes qui veulent entrer dans ses yeux ! Les objets s'évanouissent à proximité de Al ! Les nouveaux...

le 30 mars 2011

181 j'aime

35

La Vie aquatique
JZD
10

Critique de La Vie aquatique par J. Z. D.

Il faut, une fois pour toute, que je justifie ce dix, ce coeur, et cette place un peu malhonnête en tête de mon top film. En effet, ce film n'a pas les épaules (encore que c'est plus des jambes qu'il...

le 19 nov. 2010

159 j'aime

26

The Grand Budapest Hotel
JZD
8

The Budapest Hotel.

Inlassablement, le cinéma de Wes Anderson est parfait. Il est même de plus en plus parfait. Et pourtant, je ne suis pas sûr d'aimer de plus en plus ces films. Déjà, depuis un moment, ses notes...

le 26 févr. 2014

106 j'aime

9