Après Memento sorti en 2000, Christopher Nolan signe avec Insomnia sa seconde grosse production hollywoodienne. Et quel casting a-t-il réussi à décrocher ! Al Pacino, Robin Williams, Hilary Swank ou encore Martin Donovan dont le visage, au contraire du nom, m'est familier. Avec un budget plutôt important s'élevant à 46 M $, il nous emmène suivre une sordide affaire criminelle au coeur de l'Alaska, pays dans lequel le soleil ne se couche jamais durant quelques mois.
Will Dormer (Nolan nous aurait-il gratifié d'un jeu de mots à la sauce frenchie ?), enquêteur réputé (Al Pacino) et l'un des modèles à suivre pour les nouveaux flics fraichement sortis de l'école, est envoyé dans ce sublime désert américain qu'est l'Alaska afin d'aider la police locale à élucider le meurtre d'une jeune fille sauvagement assassinée. Flanqué de son collègue et ami Hap Eckhart (Donovan), ainsi que de quelques flics locaux, ils finissent par trouver un appât pour attirer le tueur en pleine nature.
A flanc de montagne, un cabane de bois se propose au coeur du brouillard redoutable et du terrain difficilement praticable. Le tueur est repéré, s'enfuit au sein des brumes, et débute alors la course-poursuite, mais elle finira mal. Pensant distinguer à nouveau le tueur par cette silhouette qui se détache parmi les ombres blanches, Will tire. Manque de pot, il s'agissait de son collègue et ami Eckhart qui décédera rapidement dans ses bras. Le problème, c'est que son ami avait prévu de tout déballer aux boeufs-carottes, lesquels le menaçaient à cause de la falsification de preuves faite par Will sur une affaire de meurtre, portant le risque d'anéantir sa carrière, voire même de relâcher certains de "ses" prisonniers, discréditant par cet effet anti-procédurial la licéité de toutes ses enquêtes. Il va donc mettre cette mort sur le compte du tueur.
Une mort qui arrange autant qu'elle détruit Will Dormer, et dans cette région recluse du monde où le soleil a dénigré le sommeil, il va l'imiter tant l'insomnie, telle un prédateur sans pitié, s'est emparé de son être d'une étreinte inébranlable. De surcroît, le tueur finit par le joindre et lui annonce qu'il est témoin de la mort fortuite de son collègue. Tout se complique alors pour Will qui va, en plus de sa situation désespérée, devoir jouer le jeu de ce tueur menaçant de tout révéler s'il venait à se faire prendre. Commence alors un impitoyable jeu du chat et de la souris, sans que l'on ne puisse jamais vraiment être certains à qui échoit tel rôle.
Le début m'est paru très prometteur, planté par une mise en scène très soignée et une musique suggestive, ainsi qu'un Pacino qui n'a pas négligé son charisme ni sa classe habituels. Mais Insomnia finit par nous étouffer, voire même laisser filtrer un peu d'ennui chez le spectateur, sans omettre le mal-aise ressenti et provoqué par une ambiance dérangeante simulant les insomnies dont souffre Will. Désagréables sont ces scènes, et si Nolan eût cherché à nous incommoder de la veille perpétuelle de son héros, il y serait presque parvenu. Dérangeants sont ces passages dans lesquels la lumière se personnifie dans chaque relief, chaque angle de vue et chaque forme portée à l'écran, aveuglant tant Will que le spectateur. Réalisation parfois poussive, donc.
Quant au tueur, j'ai bien eu du mal à en créditer Robin Williams, qui m'a confirmé ici qu'il n'était vraiment fait que pour certains rôles, et celui de méchant ou tueur n'en font pas partie. Des dialogues parfois maladroits et manquant de profondeur, un suspense qui n'en est pas vraiment un, un script incomplet et un casting qui aurait pu être mieux géré m'ont laissé dans la bouche un arrière-goût de long-métrage imparfait et non achevé. Sans être déçu, je n'ai pas été emballé non plus malgré la beauté fort séduisante de l'Alaska auquel Nolan est quand même parvenu à rendre grâce.
A voir sans trop s'en émouvoir.