Un documentaire sur quoi ?
Tout d'abord, un brin de contextualisation. Lorsque j'ai pu voir ce film, il était suivi d'un débat avec un professeur d'IEP et un ancien détenu. Ce dernier nous a avoué s'être "fait chier" et a souligné à plusieurs reprises que le film ne montrait rien sur la réalité des prisons.
J'avoue que je suis assez d'accord.
Ce film aurait pu être très bien. Je m'attendais d'ailleurs à un très bon documentaire, documenté et précis sur le fonctionnement du couloir de la mort, et plus généralement du système pénitenciaire aux états-unis.
Mais finalement qu'est ce que c'était ? Une suite d'entretiens avec des protagonistes de l'affaire Perry, sans aucun détail supplémentaire, détails qui auraient pu être ajoutés par le biais d'une voix off par exemple. Certes le film est une peinture édifiante de la misère de cette partie de l'Amérique, et du déterminisme social dont ces gens sont victimes : dans certaines familles, avoir fait de la prison est presque banalisé.
Mais cet intérêt, objectif, est bien le seul que l'on puisse trouver à ce documentaire. Herzog tombe beaucoup trop dans le sentimentalisme exacerbé, et les entretiens prennent parfois la forme d'interrogatoires, avec le zoom sur les larmes du monsieur et la musique triste en prime. Le choix de s'attarder sur une seule affaire pour défendre une cause plus large aurait pu être intéressant. Ici ce n'est pas le cas, on a plutôt l'impression de regarder une de ces émissions du style de "faites entrer l'accusé"...
Les scènes ou le documentariste demande à ses interlocuteurs de leur parler de leurs sentiments ou de lui montrer des photos de leurs gosses morts sont particulièrement édifiantes à ce titre.
Si j'étais mauvaise langue et enclin à faire des stéréotypes, je dirai que ce manque de pudeur vis à vis de la vie privée est très état-unien, et ne convient pas à un public européen. D'ailleurs je le fais. Voilà.
Bref, je repars avec l'impression désagréable et frustrante que Into the Abyss n'a fait qu'effleurer un sujet qui aurait mérité que l'on s'y attarde bien davantage...
Dommage.