Deux ans après son biopic consacré à "Yves Saint-Laurent", le comédien-réalisateur Jalil Lespert change de registre, signant un thriller psychologique à dimension érotique, librement inspiré d'un film japonais d'Hideo Nakata ("Chaos", sorti en 2000).
Même si l'on comprend assez vite que l'aspect polar constitue un simple cadre, loin d'être la préoccupation majeure de son auteur, on regrettera les incohérences assez flagrantes et les facilités du scénario :
par exemple, quel est le sens de la vidéo de la victime prise par le ravisseur à destination du mari (et de la police par ricochet) lorsqu'on sait que cet élément risque immanquablement de trahir le nœud central du plan...
Si l'on accepte de dépasser les invraisemblances du récit, on pourra se laisser séduire par l'esthétique générale du film, qui tire judicieusement profit de son décor, à savoir la capitale parisienne en plein hiver, écrin glacial qui fait écho à l'atmosphère entourant les protagonistes (belle photo au passage).
Au niveau de la distribution, le trio composé de Romain Duris (un garagiste divorcé et loser dans l'âme), Charlotte Le Bon (dans un rôle ambigu que je vous laisse découvrir) et Jalil Lespert himself (un banquier froid adepte de pratiques SM) ne démérite pas, sans parvenir toutefois à convaincre pleinement dans leur personnage respectif.
Le casting est complété par un duo de flics en mode "partenaires de baise", incarnés par Adel Bencherif et Camille Cottin, dans un contre-emploi qui paraît judicieux de prime abord.
Hélas, leur prestation se voit quelque peu gâchée par une scène (centrale à mon avis dans l'esprit de l'auteur) : lorsque la fliquette tente de faire parler le banquier, en s'écartant de toute dimension morale, et lui parle de ses propres fantasmes sexuels de façon très crue. Cette séquence qui se voudrait forte et choquante sombre malheureusement dans une forme de grotesque involontaire.
Si la scène, qui pourrait sembler anecdotique, apparaît au contraire fondamentale, c'est qu'elle incarne le thème principal d'"Iris", au-delà de la lecture premier degré du thriller à rebondissements : une réflexion sur le désir et la frustration, sur les compromis plus ou moins légitimes que chacun est prêt à accepter dans sa vie conjugale...
Dommage que sur ce terrain-là, Jalil Lespert s'en tienne à une illustration un peu cliché et superficielle, car "Iris" s'enrichit ainsi d'un niveau de lecture supplémentaire, en accord avec son intrigue.
En l'état, le film constitue un divertissement honorable et assez original, hélas lesté de maladresses et de quelques béances scénaristiques.