Septième Art et demi
Jack Frost est très lent à démarrer. Du noëlesque et de la musique (rock), c'est déjà une piste difficile à suivre. Puis vient un drame. Même après ça, il faut du temps au scénario pour se mettre en place.
Toutefois, une fois cette marge inconfortable dépassée, il y a du mieux : certains parallèles s'élaborent, et comme c'est excellemment filmé avec une lisseté sans heurt, on est appâté par la seule réussite technique de la chose ; quand un thème s'ajoute encore (le hockey), on le tolère. Dans ce premier tiers cafouilleux, on appréciera également le dilemme imposé au père de famille, du genre réaliste s'il en est, en tout cas comparé à la plupart des autres films de la catégorie "mauvais père" (dont le parangon est sans doute Menteur Menteur - Tom Shadyac, 1997). La famille ou le succès garanti ? Zut. Une fois mis de côté l'accent bien américain mis sur le foyer (il ne s'agit que de vacances en famille, que diable !), on hésiterait.
Le plus jeune public s'ennuiera avant que ne commence vraiment l'histoire. On en vient à être obligé de spoiler : le propos, c'est que le mauvais père en question meurt soudainement. Un point pour la surprise. Un an plus tard, il va ressusciter sous la forme d'un bonhomme de neige. Et là, il y a beaucoup à dire : un point en moins pour la puérilité, un point en moins aussi pour la conscience : un mort ne doit jamais revenir dans un film qui ne s'appelle pas Ghost (Jerry Zucker, 1990) ! On aurait pu se soulager de l'affront fait à notre âme humaine en se disant que sous la forme du fantasme momentané d'un enfant, l'évènement est une exception qu'on peut accepter à la condition expresse que personne d'autre que des enfants ne soit témoins de ce retour contre-nature d'outre-tombe. Et on semble s'y diriger jusqu'à ce qu'en une dernière minute qui est la négation de tout le génie de Ghost, la mère voie son mari derrière les apparences bibendumoïdes du bonhomme de neige de sa cour. Après une année de deuil, elle revit ainsi un aperçu de son ancien bonheur. Non ! On ressortirait dévasté d'une telle expérience ! Et c'est idiot, comme idée !
La magie de Noël peut faire passer la pilule de l'idiotie, mais cela n'autorise pas à laisser tomber la goutte d'eau qui met le feu aux poudres. Dommage, car il y avait un dernier bon point à mentionner : les dialogues sont certes irréguliers et facilement onomatopéiques, mais le texte du bonhomme de neige est plutôt intelligent : il philosophe longuement sur sa nouvelle condition et l'on se dit : moui, ça colle.