Jack Reacher est un dur. Jack Reacher est un vrai. Jack Reacher en a vu dans sa vie, et même si il fait que 1m70 il peut démolir facilement 5 types trois fois plus gros que lui.
Adapté d’une série de roman, ce film de Christopher Mcquarrie, réalisateur plutôt inconnu au bataillon, mais scénariste de nombreuses grosses machines hollywoodiennes, vous laissera sans aucun doute soit dubitatif, si vous ignorez le côté second degré / décomplexé, soit joyeux, si vous vous laissez prendre aux jeux et aveuglé par ce même second degré / décomplexé. Quant à moi, je suis un peu entre les deux.
On ressent une volonté assez constante de faire un film « à l’ancienne » avec un héros super-fort qui « ne passe pas quatre chemins ». Si le film s’en était tenu là et avait assumé complètement ce côté décomplexé, tout aurait finalement plutôt bien été.
Jack Reacher, finalement, c’est un peu comme un discours de Jean-François Copé, qui vous annonce avant son discours que la langue de bois, c’est pas son truc, pour orienter les opinions de son auditoire et faire passer des quenelles en douceur. Ici, c’est pareil, on vous annonce dans l’installation (jusqu’à la bagarre dans le bar) un film brut de décoffrage comme on en fait plus, avant d’étrangement redescendre subitement en intensité et se perdre dans une intrigue digne d’un épisode moyen de NCIS, puis de repartir de plus belle !
Cela laisse l’étrange impression que le postulat de ton du départ n’est pas toujours tenu. Dommage, car c’est justement dans ce ton que le film est jouissif ! La poursuite en voiture est vraiment pas mal et les quelques scènes d’action montrent que Tom Cruise a encore de beaux restes (si du moins vous n’êtes pas allergique à lui). Pire, les scènes qui veulent rendre le film sérieux lui donnent un étrange ton facho type « droite décomplexée ». Notamment le discours sur l’auto-justice serait passé tout seul si le film s’en était tenu à dépeindre son super-héros-urbain-ex-marine-sans-pouvoirs sans vouloir le rendre sérieux. À force de vouloir donner trop de substance à son film qui n’en demandait pas tant, Christopher Mcquarrie nous offre un film au ton finalement plutôt étrange, paradoxalement perverti par sa volonté d’offrir de la matière au spectateur. A force de mélanger les torchons et les serviettes, les motifs du film ne s’accorde plus du tout et on obtient un tout assez peu cohérent avec cependant quelques scènes assez jouissives. Décomplexé sans l'être, Jack Reacher est un demi-ratage, ou une demie-réussite.
A noter l'étrange présence de Werner Herzog, dont on entend seulement la voix dans un premier temps, ce qui surprend davantage quand on se rend compte qu'il ne nous parle pas d'ours ou de peine de mort.