Comment film-t-on une histoire qui a fait l’Histoire ? Comment on transcende l’essence même de cette historie, connue de tous, pour créer une autre histoire ? Cette histoire est d’ordre personnel, elle est totalement personnelle et pourtant elle est devenue par ma force du destin une histoire politique d’envergure mondiale. Le meurtre du Président John F. Kennedy est sans aucun doute l’assassinat le plus célèbre du XX siècle. Certes il y en a d’autre mais la journée dû à Dallas est celle qui vient immédiatement en mémoire. Une portée historique pour nous car il nous est possible de la revivre, chaque seconde du meurtre est visible dans un film amateur, un film peut être l’un des plus célèbre de l’Histoire du cinéma. Ce film est aujourd’hui un film d’archive, ce n’est pas une œuvre d’art, c’est un objet d’enquête, un objet pour l’Histoire qui n’a pas pour but de raconter une histoire. Le film de Pablo Larrain confond le rapport entre l’image crée pour l’Histoire et l’œuvre d’art qu’est le film de Larrain. Les images de l’actrice Natalie Portman faisant visité la Maison Blanche pour la télévision, réplique exacte du programme diffusé dans les foyers américains. Le glamour qui est à l’origine de l’image de ce couple Kennedy-Bouvier, l’image de JFK est-elle immédiatement amenée à son lègue politique ou les photos de papier glacé qui en reste avec sa femme ? Larrain mélange l’archive et l’art, ce qui est dans le film on l’a déjà vu, dans des scènes en noir et blanc, la possession derrière le tombeau
du Président, l’assassinat de l’assassin présumé Lee Harvey Oswald, le voile noir de la première dame, la marche solennelle du Président De Gaulle en tenue militaire à Washington. Et bien sur le meurtre de Kennedy, tout cela on le sait et mieux nous en sommes témoins grâce à l’image. Dès lors, il faut en faire maintenant une histoire, une œuvre d’art, une intimité. C’est que parvient à faire Larrain.
On contemple Le Sacre de Napoléon, célèbre fresque commandée du peintre David, comme un témoignage de l’Histoire. C’est une erreur, ce tableau est une histoire, celle dictée par l’Empereur au peintre, son propre témoignage, sa vision du grand jour de sa vie. Jackie Kennedy fait la même chose, elle invite chez elle un journaliste et revient sur les évènements qui ont succédé au meurtre. Dans l’ordre nous les suivons. Jackie se prépare dans l’avion, arrive en grande vedette à Dallas. Cut pendant le meurtre, retour à l’avion même espace, même plan mais cette fois Jackie est couverte de sang et de larmes. Lyndon Johnson prête serment dans l’Avion, Jackie est assise à côté du cercueil de John. Robert le frère du Président, interprété formidablement par Peter Sarsgaard ma rejoint. Tout ce qui restes c’est rendre sa dignité au Président, c’est pour Jackie en faire un martyr, lui faire des funérailles dignesde celle de Lincoln. Mais à quel prix, la plus belle scène du film c’est quand Jackie doit le dire a ses enfants « papa est aller dire bonjour à son père au ciel, il ne reviendra pas » le fils s’avance vers le cercueil il est rattrapé par Bobby. Ce qui préoccupe le plus Jackie c’est l’héritage laissé par le cours mandat de son époux. Pas grands choses, la guerre froide n’a jamais semblé si proche d’exploser, la guerre avec Castro est maintenant ouverte, la réputation des Kennedy entache la présidence. Mais Jackie elle ne pense plus qu’a rendre un ultime hommage ou plutôt à l’imposé au monde entier. Le film va aussi nous imposer cette vision de l’Histoire par Jackie, c’est son histoire et c’est en cela aussi que Jackie est un grand film. Il ne fait le surplace d’un biopic, il ne fait la précession des épisodes obligé des larmes ou des applaudissements qui ont pu être la vie du couple et puis d’ailleurs il faut les dernières scènes du film pour voir ENFIN le couple réuni dans la vie. John arrachant la main de Jackie a son frère Bobby pour un pas de danse, grand moment de cinéma de contempler le visage si rarement rayonnant de Natalie Portman dans le film, elle en est l’atout principal, l’essence majeur car elle transcende l’espace par son interprétation. Il suffit pour le comprendre d’observer deux choses chez elle, ses yeux et sa bouche, tout Jackie réside dans la bouche de Natalie Portman, une bouche extraordinaire.
Larrain nous amené à questionner la portée des images, ne pas se rattacher uniquement à ce qui nous déjà montrer, c’est-à-dire les archives que nous connaissons mais les compléter par la parole cinématographique, nous sommes pendant un instant dans la Lincoln Continental, l’impact, la cervelle sur le capot noir, la main de Jackie serrant le crane de son mari pour empêcher dit-elle « la cervelle de tomber ». Silence oppressant et coup de feu tonitruant ponctue la séquence choc du film. Nous sommes dès lors dans l’histoire que Jackie ordonnera au journaliste de ne pas publier. De même que ses propres hypothèses sur le meurtre du Président : coup politique de Johnson, belliqueux personnage qui le détester, une vengeance de Castro ou un complot de la CIA. Si Jackie l’ignore elle est la première à créer la théorie du complot si brillamment mis en scène par Oliver Stone dans JFK (1991).
L’idée du cinéaste est de filmer un visage, celui de son actrice Natalie Portman. Visage sublime, il offre à l’actrice son plus beau rôle au cinéma depuis longtemps. Parcourant le temps et l’espace de cette tournée proprement américaine, pays où tout est bâtie dans le gigantisme, économie gigantesque, figure présidentiel monumental. Tout se dit dans les moments de silence, Jackie marche, déambule comme déjà un spectre dans les couloirs de la maison blanche encore maculé du sang de son époux.
La voilà perdue dans le dédale de la maison des puissants, encore plus tôt elle faisait la visite guidée des lieux pour la télévision, on forge le mythe du couple et de la fonction de première dame, avec son langage niais entre Marylin et Miss Monde, Jackie est encore un objet qui fascine l’Amérique. Image réelle et image fantasmée s’entrechoquent, Pablo Larrain transcende un genre mis à toute les sauces.
Le BIOPIC, pas si élogieux que ça, certes le mythe Jacqueline Kennedy fascine le cinéaste mais accepte de délivrer hautement personnel loin des périodes plus superficielles de la vie de Jackie Kennedy.
Larrain délivre un biopic magistral qui mérite la place d’œuvre d’art au côté des grands réussite du genre, Saint Laurent de Bertrand Bonello ou Lawrence D’Arabie de David Lean. Une réussite qui montre le talent du jeune cinéaste mexicain, adepte des réussites avec No en 2012 et Neruda en 2017.
On gardera de ce grand film deux choses, la prestation d’une actrice (Oscar amplement attendue et mérité) et enfin une œuvre qui dit traite du plus grand traumatisme de l’Amérique avant le 11 septembre 2001 et après l’attaque de Pearl Harbour. Pour longtemps on se souviendra de ce film qui ne manquera d’être une leçon de cinéma et pour Pablo Larrain la porte ouverte à d’autres chef-d‘œuvres.