La Nuit la plus courte de la poupée de verre, traduction de La Corta Notte Delle Bambole Di Vetro, devient Je Suis Vivant en français... pour qui a vu le film, ça plombe d'emblée l'intrigue. Passons sur cette énième traduction débile de la part d'éditeurs français peu soucieux des convenances linguistiques, et c'est loin d'être le pire exemple de francisation des titres de films italiens...


Alors, sous ses apparats, ce film du réalisateur Aldo Lado, assistant de Bertolucci sur Le Conformiste et sur quelques western de série B, emprunte les codes du giallo sans en être réellement un.
D'ailleurs on a du mal à le classifier, tant il navigue entre plusieurs courants usités, du film d'ambiance psychédélique, en passant par le film de paranoïa hérité de Roman Polanski (Rosemary's Baby, Le Locataire).


Partant d'un postulat de base un peu désordonné, un schéma narratif un peu laborieux et une intrigue un peu légère, Lado parvient à installer une ambiance glauque et malsaine par un apport esthétique qualitativement de très bonne facture et un montage stylisé et incroyablement maitrisé.


Les codes empruntés au genre magnifié par Dario Argento sont évidents et plutôt très bien amenés.
C'est parfaitement réalisé, on pourrait aisément imaginer un Visconti du meilleur crû derrière la caméra.


L'intrigue est prenante et l'ambiance de cloisonnement diffusée par la légendaire et étrange ville de Prague où se situe le film, donne un sentiment de claustrophobie et de malaise qui fait un peu penser au Ne Vous Retournez Pas de Nicolas Roeg.


Le casting est composé d’interprètes plutôt d'excellentes factures et de nationalités diverses. Du français Jean Sorel, vu dans plusieurs films italiens de l'époque à un Mario Adorf relativement sobre, loin de son personnage de gangster violent et excentrique dans le magnifique Milan Calibre 9 de Fernando Di Leo. La distribution féminine de première classe n'est pas en reste, avec la sublime Ingrid Thulin vu chez Visconti et Barbara Bach, James Bond Girl dans L'Espion Qui M'aimait, vu chez Mario Bava et Sergio Martino.


Avec un travail d'écriture plus intense et un traitement plus rigoureux de l'intrigue préalable, notamment la première demi-heure qui est disons le assez chiante, ce film aurait pu être une perle, tant la réalisation d'Aldo Lado regorge de trouvailles esthétiques et parvient à distiller une vraie ambiance dérangeante en plus d'être visuellement très réussi.

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le 3 mars 2016

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