Shun Takahata est un adolescent ordinaire, vivant une vie on ne peut plus banale dont il déplore l’ennui. La situation va significativement changer le jour où un daruma (une tête de Bouddha) dotée de sa propre volonté oblige sa classe à jouer à une version macabre de « un deux trois soleil » où les participants explosent… C’est le début d’une longue série de jeux sadiques pour Shun et les autres survivants de ces « jeux » d’ampleur mondiale, qui se retrouvent bientôt enfermés dans un cube blanc survolant le monde. Accompagné de deux amies d’enfance et d’un psychopathe qui se pense choisi par Dieu, Shun va tenter te survivre…
On ressort rarement indifférent d’un film de Miike. Sa filmographie, qui oscille entre films de yakuza ultraviolents et horreur gore-bizarre franchissant presque toutes les limites de la morale, sont des exemples de ce que le Japon peut faire de plus perturbant. Ce film, adaptation du manga Jeux d’enfants, est un OVNI parmi les OVNIs que Miike a réalisés.
As The Gods Will commence comme les farces sanguinolentes dont Miike a l’habitude. Les litrons de gros rouge qui tache giclent partout dans une ambiance joyeusement barrée. Les habitués du réalisateur seront donc en terrain connu. Le film prend ensuite une dimension plus psychologique à mesure que le groupe de survivants se réduit et que se dévoilent les personnalités de chacun, notamment celle de Takeru Amaya, le givré du groupe qui s’impose comme l’antagoniste principal. Lui et Shun sont d’ailleurs les deux personnages qui crèvent le plus l’écran, le reste étant vraiment parfaitement oubliable. Cependant, c’est la fin métaphysico-kafkaïenne de ce film qui le fait vraiment basculer dans une autre dimension. Une fin qui laisse le spectateur avec plus de questions que de réponses.
En effet, quelle était la cause de tous ces phénomènes ? Les épreuves sadiques que subissent les lycéens sont-elles une métaphore des chiennes de vie que nous menons ici-bas, une critique sociale d’un Japon impitoyable envers ses jeunes ? Que va faire le hikikomori à la fin ? On ne sait pas trop ce que veut nous dire Miike : que Dieu existe bien et qu’Il a Ses élus, ou qu’il n’existe pas, et que tout ça n’est qu’un vaste bordel cruel et dénué de sens, dont l’ennui auquel Shun voulait absolument échapper constitue finalement le seul véritable abri ? Ce film a-t-il seulement un seul putain de sens ? Rien n’est moins sûr !
Sorte de film symbolico-perché croisé avec de l’horreur imitation série Z, As The Gods Will est un film sordidement absurde (à moins qu’il ne soit absurdement sordide), qui transpose l’art du WTF sur un plan quasiment métaphysique et donne au mot « malsain » une toute nouvelle définition. S’il ne quitte jamais l’esprit Miike par ses lazzi trollesques et sanglants, il a au moins le mérite de l’originalité. Avec quelques bonnes idées de mise en scène, cela fait une bobine regardable, pour peu qu’on aime ce genre et qu’on ne s’attende pas au film de l’année !