L’un des films les plus humides et froids de l’histoire du cinéma, John Mc Cabe commence sous la pluie et se conclut sous des tonnes de neige. Un plan montrant un coucher de soleil rougeoyant à travers les nuages et l’incendie final de l’église apportent de rares et éphémères touches de couleur dans cet univers dont les teintes délavées des paysages contrastent avec les ambiances sépulcrales des intérieurs. Les coups de zoom et les longues focales du chef opérateur Vilmos Zsigmond qui a poussé les limites de sa pellicule pour obtenir une image granuleuse à l’extrême donnent l’impression d’une dissolution des personnages. Cette esthétique mortuaire, encore renforcée par la mélancolie des chansons de Leonard Cohen qui semblent commenter l'image, convient admirablement au sujet du film qui nous parle de disparition, la disparition d’une époque, celle des glorieux pionniers de la légende américaine, remplacés par des aventuriers minables qui ne pèseront pas lourd face à la rapacité organisée du capitalisme naissant, mais aussi la disparition d’un genre cinématographique, le western, réduit ici à sa moins glorieuse expression. Un chef-d'oeuvre du genre!