Voilà peut être la seule expérience cinématographique de ma vie qui me laisse complétement indécis... Je suis incapable de savoir si j'ai aimé ce film....
Les polémiques qui ont précédé sa sortie en salle sont à mon sens révélatrices des nombreux paradoxes qu'il soulève et de leurs interprétations. Le Joker ( ici Arthur Fleck) est il humanisé ou glorifié ? Le film se fait il l'avocat de la violence ou dénonce-t il celle qu'exercent les privilégiés ?
Il me semble difficile de trancher si facilement entre ces différentes lectures car "Joker" ne semble jamais réellement choisir son propos. En effet, Todd Phillips son réalisateur a déclaré ne pas souhaiter faire un film politique mais "une étude de caractère dérangeante" prenant le contrepied des films de superhéros uniformes estampillés Marvel. Toutefois, celui-ci semble oublier que chaque œuvre porte en elle une dimension politique car elle cristallise le point de vue d'un.e auteur.e.
Un exemple met en lumière cette contradiction. Il dresse le portrait d' Arthur Fleck, un homme seul et marginal, souffrant de troubles psychiques. Todd Phillips dénonce alors le fait qu'il soit rejeté à cause de son opposition à une norme sociale. Une phrase écrite par le personnage lui même en atteste : "Le problème quand on a une maladie mentale, c'est que tout le monde voudrait que tu fasses comme si tu n'en avais pas" (Traduction un peu approximative mais l'idée est là). Pourtant, le film met lui aussi en marge un de ses propres personnages, Gary, une personne de petite taille. Il traite sa "différence" uniquement comme un ressort comique. Phillips contredit et annule ainsi ses propos à de nombreuses reprises et laisse alors le champ libre à toutes les interprétations.
Son Joker devient alors à la fois la caricature du "malade mental" sanguinaire et le portrait plus subtil d'une homme abandonné qui retourne la violence contre ses agresseurs ( La société et ses représentants). Ce film est un immense paradoxe cinématographique, ne choisissant jamais son propos, laissant le champ libre à toutes les interprétations, aussi bien les plus clairvoyantes que les plus dangereuses.
Noter "Joker" sans savoir quoi en penser étant tout aussi paradoxal j'ai opté pour un 5/10 en guise de "Je sais foutrement pas quoi penser de ce film bordel !"