Les spoilers sont masqués.
Si vous avez aimé le Joker de 2019, sachez que ce film n'est pas une bonne suite. Sachez également que ce film est avant tout une comédie musicale. En somme, Joker: Folie à Deux est un bon film et un mauvais film. Je m'explique;
Todd Phillips était largement en capacité d'élaborer une suite à la hauteur du premier volet, il a pourtant décidé de faire tout le contraire. Le plus incroyable dans tout ça, je pense, c'est qu'il a réussi à nous rendre acteur de cet échec. Le réalisateur de Very Bad Trip nous offre pour le coup un very bad trip de 2 heures et quelques. Phillips transforme son anti-héro qui en 2019 était devenu le symbole du dysfonctionnel de notre société dysfonctionnelle, en un personnage banal broyé par le poids de ce qu'il représente. Le premier film Joker mettait en lumière toute une partie de la population devenue inaudible, transparente, en marge. Le clown fou était devenu le représentant involontaire des incels de la vraie vie de la réalité véritable. Ici, le réalisateur éteint l'allumette qu'il avait craqué cinq ans auparavant en posant comme question centrale du film: Joker (ce film, et le personnage dans l'univers du film) va-t-il donner à son public ce qu'on attend de lui? La réponse est non. Todd Phillips ne veut pas que nous, spectateurs, glorifions son Joker. Arthur Fleck est un homme instable, un meurtrier avec des problèmes mentaux, rien de plus.
Cette mise en abime remet en question ce que le spectateur à envie de voir et ce qu'il a besoin de voir. Todd Phillips nous puni, se joue de nous, et c'est tout ce que nous avons mérité.
Comme je le disais plus haut, le film n'est pas mauvais: au premier abord c'est une mauvaise suite au Joker de 2019, mais c'est une agréable comédie musicale portée par un grand acteur qui ne pêche jamais, et son acolyte jouée par une Lady Gaga très convaincante. Cependant, le film est long et le récit fait parfois du sur-place. Si on fait abstraction de son brillant côté meta, il reste une critique sur le regard qu'on porte sur les problèmes mentaux et notre addiction au spectaculaire au détriment de l'humain.
Le coté méta qui prend tout son sens par le biais du personnage d'Harley Quinn, qui quitte la salle du procès lorsque Joker redevient Arthur Fleck et refuse de se donner en spectacle. Il refuse de faire porter le chapeau à cette société qui l'aurait transformé en ce qu'il est. Quelques secondes plus tôt, une dizaine de personnes quittait ma salle de cinéma lassés de ne pas retrouver l'antagoniste vu en 2019. Un peu plus tard dans le film, le clown prend la fuite et retrouve Lee. Il l'a rassure; il est toujours le Joker. Le personne joué par Lady Gaga lui dit que non, il ne l'est plus, et s'en va désabusée. Nous sommes Harley Quinn devant le film. C'est brillant.
Lorsque Fleck devient son propre avocat, le public se galvanise et attends de lui un déluge verbal et/ou violent. Mais sa défense est un non-sens absolu... à quoi d'autre pouvions-nous nous attendre? C'est un homme avec des problèmes mentaux qui décide d'assurer sa propre défense, cela ne pouvait être autrement.
Dans la dernière minute, Arthur Fleck est cet homme ayant accepté sa condition et est en paix avec lui même, il n'est ni un héro, ni un anti-héro. Il se fait poignarder, et meurt. On découvre en fond que son assaillant revêt les traits du Joker. Comprenez bien le message de Todd Phillips: je fais ce que je veux de mon personnage, et des Joker il y en a d'autres.
En vrac, j'ai aimé
- Lady Gaga, très bonne actrice
- Un duo qui fonctionne à la perfection
- L'aspect méta du film qui relève du génie
- Une très jolie mise en scène des parties musicales
- Cette manière très crue de filmer la violence
J'ai moins aimé
- Les longueurs
- La séance en IMAX qui ne vaut pas le coup