Mankiewicz adapte au cinéma Julius Caesar, la pièce théâtrale éponyme de William Shakespeare, avec une virtuosité sans égale dans le genre du péplum. La direction artistique se caractérise par une maîtrise indéniable, tant sur le plan de l’interprétation des acteurs qu’à propos du découpage des scènes. Le réalisateur, réputé donner une importance prépondérante aux dialogues et aux rapports entre les personnages, fait preuve d’une efficacité remarquable en retraçant adroitement la conspiration, l’assassinat de César et les conséquences de cet acte. La sobriété générale et l’apprivoisement par Mankiewicz de l’œuvre originelle concourent à la majesté et à l’éclat de celle-ci. James Mason (Brutus) et Marlon Brando (Marc-Antoine) déploient un talent inouï et une justesse extraordinaire. La simplicité de la mise en scène et des décors s’effacent au service des convictions poignantes des protagonistes dévoilées par une rhétorique exceptionnelle qui atteint son paroxysme lors des discours de Brutus puis Marc-Antoine, quelques instants après le régicide. Le premier annonce les raisons du complot tandis que le second harangue la foule et parvient à s’en attirer les faveurs précédemment rendues à la cause des conspirateurs. Ce moment charnière révèle à la fois toute l’habilité de l’éloquence et l’élégance du verbe shakespearien, et traduit l’assiduité de la reproduction. Avec un enchaînement de joutes verbales entre des interprètes investis et conformés au style de la pièce, Julius Caesar converge à la concrétisation d’une tragédie solennelle et grandiose.