J'ai cru que j'aimais bien Joachim Trier, puis film après film j'ai compris que j'avais commencé par le meilleur. (Oslo le 31 août)
Je n'ai rien contre le fait de diviser un film en chapitre. Même si sur la forme c'est quand même très littéraire, cette année Tromperie l'a fait et ça n'en fait pas un mauvais film, au contraire. Seulement ici, cela donne l'effet d'un enchainement bien trop rapide de tableaux fades et artificiels. Ca ne prend pas, les personnages se rencontrent à peine qu'ils sont déjà en train de s'engueuler pour savoir s'ils veulent avoir un enfant, la voix off de la narratrice en début de film n'aide pas, d'autant qu'elle disparait après un certain temps, pour revenir en plein milieu au moment d'une scène de rupture. Elle n'a pas de cohérence, elle semble être là car cela fait bien d'avoir une voix qui raconte la vie d'un personnage, mais elle n'apporte aucune plus value, elle répète des choses que l'on voit déjà à l'écran... Merci. Desplechin l'a cent fois mieux utilisé par exemple dans Comment je me suis disputé...
Par ailleurs, on ne voit pas vraiment les personnages communiquer. J'ai été étonné lorsque Julia dit à Aksel qu'ils avaient vraiment des conversations très spéciales, car on ne les jamais entendu avoir ce type de conversations. Elle passe son temps à penser à un autre dès la troisème séquence du film. Sa relation avec le second amant n'est d'ailleurs pas vraiment meilleure; amorcée par une rencontre clichée, qui a le mérite de faire sourire à une ou deux reprises, mais qui s'affaisse dès lors que Trier choisit qu'ils vont se rencontrer à nouveau, par hasard évidemment. Du coup, inévitablement, ils finissent ensemble. J'aurais toléré ces retrouvailles un peu convenues si cette relation avec été mieux travaillée, mais c'est encore une fois la même chose, on énumère les hauts faits de la vie de ceux qui nous intéressent sans en creuser la coquille, et puis on accélère sur les bons, les mauvais moments et les crises. Où est le réel dans tout ça ? Oui Trier veut nous attendrir, veut nous faire pleurer et s'en est assez agaçant par moments.
Il utilise bien trop souvent les effets un peu tape à l'oeil comme les ralentis, la musique classique (pour le coup bien trop classique) lorsqu'il faut souligner une tension, et enfin cet effet assez vu et revu "d'arrêt du temps".
Cerise sur le tragique, il faut bien qu'il y en ait un qui meurt, sinon on est pas dans un film de Trier.
Et si dans Oslo, ça passait, ça restait cohérent avec la vie de ce pauvre type paumé qu'on suivait depuis le début, ici c'est absolument gratuit, ça n'apporte rien à l'histoire et au personnage de Julia, si ce n'est pour nous montrer que c'est très triste et que Julia est triste, et qu'il faut, par conséquent, que nous soyons tristes nous aussi. Je pourrais également évoquer l'épilogue, qui ne sert pas non plus à grand chose, si ce n'est à valider ce que l'on avait déjà compris.
Je charge pas mal le film mais, malgré tout, je n'arrive pas à le détester. A-t-il des qualités ? Surement ... Où ça ? Je ne sais pas bien, peut être sont-ce les acteurs eux-mêmes, qui malgré tout livrent une prestation assez touchante, des thématiques qui suscitent un léger intéret, un espoir avant de retomber un peu, à l'image de l'entretien radio, bien trop court.
Enfin, Anders Danielsen Lie, qui mérite un grand rôle en dehors du cinéma de Trier, car malheureusement, même s'ils peuvent s'avérer attachants, les personnages que construit ce dernier sont toujours des stéréotypes d'une certaine jeune bourgeoisie sans qu'ils aient la substance nécessaire pour se rendre crédible et nous impliquer davantage.
Je pense que Trier n'est pas un mauvais cinéaste, mais il y gagnerait à enlever les fioritures éculées de la romance et du drame pour se recentrer sur l'écriture de ses personnages qui manquent de profondeurs, de complexité, de contradictions. Oslo s'en était bien rapproché mais Julie en 12 chapitres prend un mauvais départ et se vautre devant la ligne d'arrivée, en ayant tenté un sprint poussif au milieu, mais que le coureur pense magistral.