Nous sommes en 1980 soit 5 années après le fantastique Dersou Ouzala, loin de de la période très prolifique du Maître qui réalisait un voir deux films par an, c'est surtout à cause du financement important pour mener le projet à bien que Kagemusha a mis du temps à voir le jour.

Le récit nous conduit dans une guerre de clans en plein XVIème siècle durant lequel le charismatique leader Shingen Takeda est blessé mortellement, avant de rendre son dernier souffle et si proche de conquérir Kyoto et le reste du Pays, il souhaite que sa mort soit dissimulée durant 3 années. Il se trouve heureusement que quelques jours avant un homme qui ressemblait trait pour trait à ce Seigneur de Guerre a été arrêté, nos généraux décident donc de se servir de lui comme façade pour éviter d'être la cible des clans rivaux qui pourraient profiter de cette faiblesse et de transformer notre discret voleur en homme régnant d'une main de fer sur des milliers d'hommes...

Kamegusha c'est comme toujours un film qui offre plus que la première couche visible au préalable. C'est d'abord une prestation éblouissante du successeur de Mifune, Tatsuya Nakadai qui fut d'abord son jeune rival dans Yojimbo et Sanjuro avant de l'aider au mieux dans le petit bijoux Entre le ciel et l'enfer. Et qui cette fois ci se retrouve à jouer deux facettes totalement opposées avec une aisance remarquable, passant du meneur imposant au voleur pour qui toute cette histoire est bien trop lourde pour ses frêles épaules. C'est également une fresque monumentale qui plutôt que de miser sur l'action, accentue son angle sur ce subterfuge insensé, les relations humaines qui en découlent, le jeu de pouvoir, l'ambition démesurée et l'évolution engendrée par un prestige offert sur un plateau d'argent qui transforme une copie en original.
C'est encore et toujours une photographie belle à en pleurer, accentuée par une réalisation magistrale qui offre un rendu mémorable aussi bien lors du cauchemar de notre imposture que lors des rares scènes de batailles.

Kagemusha c'est une épopée inoubliable dont seul Kurosawa a le secret, celle qui en partant avec un postulat assez simple devient une énorme remise en question sur les choix opérés et les conséquences des décisions prises pour remporter des batailles. Jamais manichéen, traité avec intelligence, voilà donc une belle leçon du Maître distribuée aux nombreux films du genre qui préférèrent un traitement artificiel dans la surenchère et dans une lutte clairement établite du bien contre le mal à la profondeur des thèmes défendus ici.

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