L'écran de fumée

Si tu veux, tu peux. Faut-il applaudir Inès (Inoxtag) pour sa montée de l'Everest ? Lui qui n'avait jamais vraiment fait de sport jusque-là et dont la vie se résumait à tourner des vidéos avec son équipe. Il lui aura fallu un an de préparation pour réaliser cette ascension. Un temps très court afin de se mettre en condition, il est vrai. Cette chose n'est qu'une question de temps et de détermination? C'est ce que le doc veut nous dire, enfin, pour réussir cela, il faut avoir l'entourage et l'argent pour le faire. C'est égal au message qu’utilisait Leroy Merlin en nous montrant de superbes maisons. Et qui disait vos idées ont du talent. Du talent, peut-être, mais c'était surtout celui des autres. Un talent payé avec l'aide d'un bon paquet de billets. Là, d'accord, on peut faire ce que l'on veut et ce simple bout de papier aide grandement à réaliser les défis. On peut même faire tout un tas de conneries plus débiles les unes que les autres, car on a l'argent. Dépasser ses limites, être le seul et l'unique, car tu es un être exceptionnel, bien au-dessus des autres. Ce discours est servi par les publicitaires depuis plusieurs années, notamment pour les pubs de voitures et de sport. On veut nous faire croire que des voitures de série sur lesquelles on choisit la couleur du toit font de cet achat une chose unique et différente des autres. Quelle magnifique connerie. D'ailleurs, le passage dans lequel on voit Inès s'entraîner ressemble fortement à une pub de sport. Le montage est digne des meilleures pubs Décathlon. Attention le niveau, Décathlon ce n'est pas n'importe quoi.

Inès se trouve scandalisé par le fait que, sur le camp 4 de l’Everest, certains laissent leurs poubelles. C'est vrai que c'est dégueu et pas du tout écologique. Mais il ne se pose pas un instant la question de savoir s'il pollue avec ses entraînements aux quatre coins de la France, ou si ses allers-retours à l’Everest avec son équipe polluent. Ou encore, quand il prend un hélicoptère pour revenir au village. Non, ça ne lui effleure pas une seconde l'esprit, car il a un but : se prouver à lui-même qu'il peut gravir le plus gros caillou du monde. Parce que ça, c'est un vrai défi, un défi de bonhomme. Et finalement, faire des vidéos, ça ne sert à rien, donc lâchez vos écrans, c'est un poison, dit Inès. La vraie vie, ce n'est pas ça. Ce n'est pas de scroller, ni de rester derrière un écran. Ses parents ne lui ont jamais dit ces choses peut-être? Il lui aura fallut gravir l’Everest pour se rendre compte de cela? Certains sont plus lent que d'autres à comprendre. Donc les écrans ne sont pas bon, mais son film est directement mis sur YouTube. Ben oui, si Kaizen peut lui rapporter un peu, c'est bien tout de même. Espérons qu'Inès regarde son film afin qu'il puisse se rendre compte du nombre de fois où il prononce les mots "mec", "frère", "putain", "je me chie dessus", cette façon de parler est ridicule. De plus, ce vocabulaire restreint devient insupportable à la longue. 2h30, de documentaire c'est beaucoup trop, la montée de l’Everest dure bien trop longtemps. On attend que tout cela se termine. Inès n'est pas antipathique, mais il n'a rien de génial non plus. C'est un film sur le moi je. Le garçon ne parle que de lui, de ses sensations, de ce qu'il fait. Pourtant il est entouré mais il ne parle pas vraiment des autres, seul compte son expérience et ce qu'il va faire. L'affiche résume parfaitement le film. Il y a Inoxtag et l’Everest, le reste est accessoire. Il devrait s'inspirer de ce que Shaka Ponk a fait de meilleur, c'est-à-dire prendre conscience qu'ils devaient arrêter leur carrière dans le but de faire du bien à la (musique) planète. Voilà un vrai défi qu'il devrait penser à relever. Ce parcours il va lui falloir encore un peu de temps avant de le faire.