L'affiche évoque Bergman, Fellini et Bertolucci, je n'ai rien vu de tout ça, ça doit être des arguments commerciaux, par contre Bunuel est là, dans cette façon qu'a Verhoeven de toujours mettre en jeu les rapports de classe. En jeu : c'est-à-dire que Verhoeven n'aligne pas les signes distinctifs, il se contente de peu, mais il les fait se rencontrer, par le prisme du sexuel, de la cruauté et de l'ironie. C'est toujours dans la mise en scène (et pas seulement dans l'image) que ça se passe.
J'avais quelques réticences avant de commencer à regarder Katie Tippel, j'avais peur du film en costumes, mais finalement c'est toujours la même chose chez Verhoeven : rien n'est a-priori excitant, tout le devient. C'est comme s'il y avait chez lui une lutte contre la lourdeur du cinéma qui ne passait pas par le rejet des formes éculées, mais par leur réanimation acharnée. Surtout, ce qui me séduit, c'est ce désir de profondeur : il n'y a pas une scène qui ne cherche pas l'ambiguité. Or c'est par le spectacle que Verhoeven donne l'illusion du double-fond et du renversement de perspective. Et c'est une chose assez rare pour être notée.
Le film s'arrête un peu rapidement, comme s'il n'était que l'extrait d'une fresque. C'est précisément ce que représente Katie Tippel dans la filmographie de Verhoeven : un extrait, pas nécessairement le plus passionnant, mais d'une cohérence folle avec l'oeuvre globale. Katie Tippel est l'une des héroïnes verhoeveniennes, qui toutes ensemble forment un bataillon solidaire et révolté.