Ceci n'est pas la fin, mais le commencement.
Kids Return est un vrai film sur les "Hamidashimono". Ce terme signifie littéralement "celui qui sort/déborde du lot", et vise les marginaux de la société, particulièrement vus comme des gênes dans une société aussi carrée que celle du Japon où tout le monde essaye de faire la même chose que son voisin par peur de se démarquer. "Le clou qui sort du mur sera enfoncé" comme on dit là-bas.
Le film met en avant 2 lycéens mauvais en cours, qui passent plus leur temps à racketter, emmerder les profs et essayer d'aller voir des films X en douce plutôt qu'étudier. Paumés mais insouciants, ils paraissent invincibles jusqu'au jour où ce boxeur arrive pour leur mettre une correction. Ce premier obstacle de la vie marque une étape chamboulant la vie des 2 ados qui se lanceront alors dans la boxe : l'un pour la vengeance, l'autre juste par amitié.
Kitano lui-même n'apparaît jamais, mais il se met en scène à travers ces 2 personnages qui marchent sur la pointe des pieds pour paraître plus grand. Ils reflètent à la fois sa personnalité et sa propre jeunesse, tout en portant un message plein d'espoir à la jeunesse japonaise sur ce qu'est la vraie valeur de l'adolescence, période que personne n'en profite assez quand il est encore temps.
Il y a une nette opposition entre ces marginaux et l'administration scolaire formatée qui cherche à les rejeter. Comme il l'a toujours dit dans des interviews ou des émissions de variété, Kitano critique ici la faille de ce système scolaire poussiéreux, avec des profs qui se contentent de suivre le manuel point par point (comme l'illustre si bien la scène où le prof relit bêtement ce qu'il vient d'écrire sur le tableau mot par mot). Ils passent leur temps à compter le nombre d'examens réussis pour maintenir les statistiques de l'école, plutôt que de se soucier des problèmes de chaque élève. L'individu disparaît, il n'y a plus que des chiffres.
A noter qu'un des professeurs est joué par Leo Morimoto, acteur connu pour sa façon extrêmement monotone de parler. Sa voix soporifique colle donc parfaitement avec le rôle, les cours paraissent encore plus chiants et interminables.
La mise en scène est très sobre mais avec un rythme vraiment maîtrisé. Comme au début du film où on voit un prof garer fièrement sa nouvelle voiture, et au plan suivant on voit la même voiture brûlée, avec le prof tenant un extincteur d'un air désespéré. C'est vraiment excellent comme montage. Le tout est accompagné avec la fabuleuse bande son de Joe Hisashi, sûrement une des plus réussies de sa carrière. Avec des instruments et des mélodies rappelant le soleil frappant d'Okinawa, la musique accentue cet espoir qui brille dans les yeux de ces jeunes à la recherche d'une identité et d'un but.
Au final, l'histoire en elle-même est classique, le thématique ainsi que le déroulement de l'intrigue sont convenus. Mais malgré ça, Kitano réussit à nous enchanter avec ses personnages attachants, ses plans efficaces et son récit beau et émouvant. Intelligent mais pas prétentieux, parfois idiot mais jamais niais, Kids Return est le genre de film simple et finalement un peu triste mais qui nous donne étrangement beaucoup d'espoir et nous rend heureux après son visionnage, comme ce fut le cas avec l'été de Kikujiro. Combien de films peuvent prétendre cela ?
Et pour conclure : http://www.youtube.com/watch?v=544bkI1hmGk