En 1989 Fabrizio De Angelis a une idée de génie. Il se dit qu’il pourrait écrire et réaliser un film super original mettant en scène un crocodile tueur gigantesque face à un groupe de personnes que les autorités locales ne croiraient pas ou feindraient de ne pas croire pour ne pas déranger l’économie locale. Notre groupe de baroudeurs va rencontrer un vieux chasseur qui va leur prêter main forte dans leur périlleuse mission et évidemment tout le monde va les croire après une attaque de la bestiole en plein jour en centre ville.
Avec un scénario pareil l’ami Fabrizio se dit qu’il va toucher le gros lot mais vu qu’il a peur des procès de la part d’un américain méconnu ayant réalisé un petit film passé inaperçu il y a plus d’une dizaine d’année avec un requin dedans il se dit qu’il faut agrémenter son scénario de nouveaux éléments. Ni une, ni deux voilà notre groupe de baroudeurs transformés en enquêteurs écologistes dans la jungle. En plus c’est bien ça écologistes. Ça permet de mettre du dilemme moral sur la possibilité de tuer le croco pendant une demi-seconde. En plus on pourra dénoncer la pollution parce que c’est pas bien.
Un second problème se présente à notre marlou. Un crocodile géant en animatronique ce n’est pas donné au premier venu et celui qui est dans le film flotte lamentablement, est très peu articulé et à des yeux jaunes peints (donc fixes) très moches. Heureusement Fabrizio a de la bouteille et a traîné en tant que producteur sur les plateaux de Lucio Fulci. Les effets spéciaux ça le connaît donc. Et puis il a aidé Enzo G. Castellari sur « Les Guerriers du Bronx ». Que pourrait-il mal se passer ?
Manque de bol. Le crocodile prend l’eau et rouille. Les figurants dominicains sont obligés de l’aider à les boulotter. La bête pousse des cri de fauves (la joie des bandes sonores libre de droit j’imagine) et la musique plagie allègrement « Les dents de la Mer ». Les acteurs sont à l’avenant. Le héros est blond avec une barbe de baroudeur. Sa copine est là. Le scientifique a des lunettes et la collègue métisse sert de bonne et à se faire becter en premier (mais après le chien, l’honneur est sauf).
Et puis il y a Ennio Girolami, vétéran passé chez Fellini mais aussi par toutes les modes du cinéma transalpin (du péplum au western en passant par le post apocalyptique). Ennio donne tout ce qu’il a. Il grimace et frétille de la moustache fusil à la main, fait du surf sur le dos du crocodile avant de se faire manger puis de ressusciter dans un final durant lequel le bon goût et la cohérence ont rencontré la cocaïne des producteurs. C'est tout de même pratique les tournages en République Dominicaine.
Bellissimo.