J'ai décidé, après avoir vu le film hier, de laisser décanter car j'avais du mal à comprendre ce qu'avait voulu faire Scorcese.
Quel film voulait-il réaliser ? Un drame historique ? Une histoire d'amour impossible ? Un film d'enquête (genre mississipi burning) ? Une dénonciation du capitalisme le plus vil et cynique ? Une description du mode de vie disparu des osages ?
Peut-être un peu de tout en fait.
La genèse compliquée du film, qui devait plutôt partir du syndrome du "white savior" avec Leonardo en agent du FBI, sa réécriture massive, la covid, ont fini par donner un film intelligent, mais hybride qui oscille entre 3 époques, la découverte de la société osage et l'amour , le récit criminel et l'enquête.
En mettant néanmoins ce film en perspective des autres du maestro, le plus évident pour moi est la volonté de scorcese de démontrer l'immense fragilité des êtres et des sentiments, l'avidité de l'âme, la faillite de l'honneur et du simple sens de la fraternité humaine
la loge maçonnique à laquelle appartient de niro en prend plein la poire en terme de corruption morale
La position intenable - et intenue- de leonardo di caprio en fait une victime toute désignée des manipulations sordides de son oncle - de niro d'un cynisme répugnant - et amene di caprio aux confins de la folie;
la scène ou di caprio comprend enfin l'empoisonnement de sa femme, et prend sa "part" du poison est virtuose
Reste la découverte majeure du film, celle de lily gladstone, qui est époustouflante de vérité humaine, et dont chaque scène vole l'écran , tant elle est lumineuse (au début. ) d'une intelligence humaine rare, sans compter un charme de fou (je sais je suis sous le charme)
la scène ou elle explique à ses sœurs qu'elle aime di caprio malgré le fait qu'il en veuille à son argent....
sans compter celle extraordinaire ou elle se lève sans un mot et laisse un di caprio comme deux ronds de flan car il lui a menti une fois de trop
Le coté imbriqué de ces 3 périodes fait que le film semble se chercher (longuement d'ailleurs le film est déconseillé aux hommes de plus de 60 ans) et ne frôle pas la maestria de casino, ou encore les affranchis qui soutenaient aussi la volonté de décrire un milieu qui disparaissait.
Reste une belle idée celle du radio crochet (sponsorisé par le FBI et lucky strike) qui permet au maestro lui-même de faire un speech émouvant, rappelant le prix humain d'un tel cynisme moral.
Pas un chef d'œuvre donc, mais un excellent sorcese, dont l'âge renforce chaque fois l'amour qu'il porte aux faibles moralement, et à ceux qui les subissent en payant le prix fort.