Pourquoi le choix d’une critique en questions-réponses ?
Dans le souci d’apporter plus de lisibilité, et afin que le lecteur saisisse les éléments essentiels de mon opinion, j’ai choisi ce format qui apporte également une pointe d’originalité. La principale raison reste que ce gabarit ne demande pas d’effort de rédaction, à mon grand soulagement.
Cette critique, n’en déplaise à certains, sera en grande partie une comparaison entre les deux opus de la saga Kingsman. Considérer Kingsman : The Golden Circle indépendamment de Kingsman : The Secret Service me parait compliqué, voire impossible tant les deux films sont liés entre eux.
Quels éléments unissent ces deux films ?
Il est évident que pour comprendre et apprécier pleinement Kingsman 2, on doit avoir vu le premier volet. Ce-dernier est référencé tout au long du film, tant par l’image que par les dialogues, certaines scènes sont mêmes quasiment rejouées, et bon nombre de gags ne fonctionnent que par rapport au film de 2015. J’avoue avoir une petite préférence pour le premier opus, qui bénéficie d’un effet de surprise et d’une ambiance particulièrement attachante. Mais j’y reviendrai.
Que dire de l’action et de l’influence de Matthew Vaughn sur cette-dernière ?
C'est à présent bien connu, Kingsman a été une petite révolution dans le monde du blockbuster, spécialement de par son action. Matthew Vaughn a su donner un véritable style à ses combats, qu'on saurait à présent distinguer de ceux des autres films. Il avait su nous scotcher à notre siège en 2015, par ces mouvements de caméra tournoyants et ses plans-séquences, mais également grâce à l'effet de surprise devant ces innovations techniques et chorégraphiques. La surprise est passée à présent, et je considère que Vaughn n'a malheureusement pas tenté de repousser les limites de ce qu'il avait fait précédemment.
L’action n’en reste pas moins d’excellente qualité, et supérieure à celle qu’on peut trouver habituellement. Elle est plus extravagante, c’est la seule chose qui puisse expliquer qu’on la préfère à celle du premier opus : autrement elle lui est soit égale, mais avec l’effet de surprise et l’innovation en moins, soit légèrement inférieure, mais pas assez pour décevoir.
Matthew Vaughn peut dorénavant être qualifié de réalisateur intelligent au style véritablement marqué, qui s’impose comme une référence et une valeur sûre dans le monde du blockbuster.
Comment fonctionne le casting ?
Très bien. Le cast est au moins aussi bon que lors du premier volet, avec une multitude de grands noms. On retrouve Taron Egerton (Eggsy), qui se fraye un chemin dans le business et s’impose peu à peu comme un acteur de confiance pour des films assez légers somme toute. À lui de prouver qu’il est capable d’assumer des rôles plus complexes. C’est également le retour de Colin Firth (Harry), que j’ai trouvé à mon grand regret moins classe et imposant qu’auparavant. Il garde néanmoins une prestance et une élégance non-négligeables. Mark Strong est toujours aussi bon dans le rôle de Merlin, capable de provoquer des situations prêtant au rire tout en restant sérieux.
S’ajoutent à cette joyeuse équipe Halle Berry (Ginger), Channing Tatum (Tequila), Julianne Moore (Poopy), Jeff Bridges (dans un rôle très secondaire) et Elton John (cocasse, n’est-ce pas ?). À défaut d’avoir un Samuel L. Jackson au casting, The Golden Circle peut se vanter d’avoir un Pedro Pascal, ce qui subjectivement aurait ramené ma note à environ 10/10.
Quelle importance les antagonistes ont-ils ?
Comme dans la plupart des blockbusters, les antagonistes doivent être crédibles. Ils donnent du mouvement à l’histoire, et définissent même le scénario. On peut recenser au moins trois "méchants" dans ce second opus, dont les motivations sont chaque fois bien expliquées et assez pertinentes.
Ainsi, Poppy se bat pour la légalisation de la drogue afin de pouvoir retrouver son pays, et remet en cause à juste titre les lois qui interdisent certaines substances. Par un chantage organisé, elle pense forcer le président à abroger ces lois, mais le chef de l’État préfère, dans l’intérêt de son pays, laisser les « drogués » du monde entier disparaître. Vient enfin Whisky, dont le point de vue se rapproche du président, mais qui est nourri par un drame personnel. Ainsi, on peut dire que la force des antagonistes réside davantage dans leurs motivations que dans leur caractère et leur charisme. Les Kingsmen se battent ici contre des idéaux, là où dans le premier volet, ils combattaient ce qu’on retiendra tout d’abord comme une personnalité (Valentine).
Le scénario est donc dicté par les antagonistes, qui sont plus nombreux dans ce deuxième opus. Pourquoi ?
Kingsman : The Secret Service installait un univers (d’ailleurs tiré de BDs). Il consacrait sa première moitié à la découverte de cette société, les Kingsmen, et à l’entrainement d’Eggsy. Le véritable combat ne commençait qu’au bout d’une heure (sans que l’ennui n’intervienne), et le duo Valentine-Boutella suffisait à dérouler l’histoire. Ici, le film doit tenir 2h20 d’action et de combat, il a déjà utilisé la carte de la présentation et se doit d’entrer directement dans le vif du sujet. Il est alors pertinent d’intégrer plusieurs antagonistes, car à moins d’avoir le méchant du siècle, plus de deux heures autour du même ennemi peuvent paraitre très longues.
Il en ressort que le film gère très bien ses personnages et ne laisse pas de place à l’ennui, tout en incluant quelques surprises. Il n’a pas peur de sacrifier des personnages cette fois-ci, là où le premier volet avait été frileux. Le scénario est très bien écrit, et déroule une trame accrocheuse pimentées par ces fameuses scènes d’action.
De plus en plus, la musique devient un outil important dans les blockbusters. Comment est-elle employée dans Kingsman ?
Le 4ème art prend de l’importance au sein du 7ème, oui. Dans les blockbusters, elle sert le plus souvent à rythmer l’action, mais est également exploitée dans les autres genres. Je pense notamment à Dunkirk, qui serait nettement moins savoureux sans sa bande son, ou encore à Baby Driver, qui nous offre une utilisation inédite de la musique. Mais revenons à Kingsman.
La musique, comme dans la plupart des films à gros budget, sert ici à rendre l’action encore plus vivante qu’elle ne l’est déjà. C’était un fait dans le premier opus, c’est une évidence dans le second. La BO de Kingsman 2 est d’excellente qualité, Henry Jackman reprend des thèmes déjà entendus et les revisite tout en enrichissant une bibliothèque déjà riche. Se mêlent aux titres créés spécialement pour le film des morceaux bien connus dans la pop culture, le tout toujours bien utilisé. Car une fois qu’on possède une bonne BO, encore faut-il savoir s’en servir intelligemment, et Kingsman n’a aucun problème de ce côté-là. Dommage qu’on n’ait pas le droit à de l’Elgar pour ce deuxième volet…
Quel ton le film adopte-t-il, et quel genre d’ambiance y développe-t-on ?
Bien qu’étroitement lié au premier opus, Kingsman : The Golden Circle possède une atmosphère qui lui est propre. Il se détache de cette ambiance british qui régnait auparavant, et même si cette-dernière m’a manqué, je dois reconnaitre que cette séparation était nécessaire, autrement la saga aurait déjà commencé à tourner en rond. On troque donc les hauts de formes contre des chapeaux de cowboys, les Oxfords contre des bottes, et direction le Kentucky. C’est sans parler de l’univers retro à Poppy Land, qui contribue à une ambiance toujours plus délirante et un ton encore plus décalé. C’est ainsi que l’humour, l’action, l’atmosphère et la tonalité du film arrivent à battre le premier volet sur le plan de la démence, ce qu’on peut interpréter comme une bonne ou une mauvaise chose, mais qui dans les deux cas ne gêne pas le film outre mesure.
Conclusion ? (oui, on ne s’est pas foulés pour cette question)
Kingsman : The Golden Circle est un excellent divertissement. Il fait honneur au premier volet, même si j’ai pour ma part une petite préférence. Un scénario intelligent, des antagonistes aux motivations crédibles, des personnages charismatiques et attachants, un très bon casting, des pointes d’humour qui font mouche, des combats hyper stylés comme on aimerait en voir plus souvent, empreints de l’identité visuelle propre à Matthew Vaughn, et sublimés par une BO de qualité : l’esprit Kingsman ne semble pas près de s’essouffler, ni même de nous décevoir.