Mais quel sale gosse talentueux ce Matthew Vaughn ! Le pitch et la bande-annonce m’avaient peu conquis et pourtant, une fois de plus, face au film, je me suis totalement retrouvé dedans. Qu’il est malin le Matthew, parce que, l’air de rien, il n’en est pas à son coup d’essai. Pour moi, ce « Kingsman » est à James Bond ce que « Kick-Ass » fut à Marvel : un rafraichissement total d’un concept passé réadapté au monde d’aujourd’hui. Alors j’en vois déjà venir qui diront sûrement : « pff… Finalement rien de neuf à part des bagarres très nerveuses, beaucoup de violence gratuite et une approche parfois cabotine et sans sérieux de son sujet… » Ils n’auraient pas totalement tort, mais ce n’est regarder là que la surface de l’iceberg. Alors oui, forcément, il est question d’action dans ce « Kingsman » qui se revendique pleinement comme un film d’agents secrets dans la plus pure tradition des « James Bond », « Jason Bourne » et autres « 24 ». Mais dans la même logique irrévérencieuse que « Kick-Ass », « Kingsman » entend en dynamiter violemment les codes qu’il estime obsolètes et usés pour les remplacer par des éléments plus en accord avec leur période. Fini le temps de l’opposition d’Etats, ce sont les riches qui mènent la danse et font le monde, au mépris des valeurs qui l’avaient édifiées autrefois et surtout, au mépris d’une masse populaire totalement laissée à son propre sort. Ne serait-ce que pour cette simple confrontation entre ces deux univers, dans un monde ultraconnecté, boursouflé, au bord de l’implosion et du non-sens, « Kingsman » parvient à mon sens à revigorer un genre qui avait du mal à se débarrasser du spectre des intrigues classiques de la Guerre froide. Certains pourraient alors rétorquer que déjà « Skyfall » s’était risqué sur cette voie… Dans le propos certes, mais dans la forme, j’avoue que le résultat de ce dernier James Bond m’avait laissé un peu dubitatif… C’était mou, c’était froid, et c’était au fond assez basique, sans antagonisme vraiment captivant. Là, Vaughn remet les choses au clair tout de suite : le dépoussiérage du genre passe aussi par la forme. Et c’est d’ailleurs là que je trouve totalement pertinente cette réalisation nerveuse, agrémentée de cadres très fouillés. Pour le coup cette forme correspond parfaitement au fond : oui ces nouveaux agents sont forgés à l’adrénaline, à l’immédiateté, à la surenchère et à une certaine forme de puérilité. Mais, un peu à l’image de son personnage, la réalisation de Vaughn ne sombre pas dans le « too much » et sait parfaitement s’appuyer sur ce qui faisait la qualité de ses anciens. En cela il s’oppose parfaitement à cette hiérarchie faussée qui se pense maitresse du monde, mais peu soucieuse des valeurs qu’elle colporte ou bien même de la responsabilité de ses actes. Vous l’avez compris, moi ce film je le trouve malin, espiègle, particulièrement bien mené en terme de progression de son intrigue (superbe climax final d’ailleurs) et surtout servi par des acteurs racés qui savent donner vie à des personnages qui ne le sont pas moins. (Mais quel casting quand on y réfléchit : Colin Firth, Mark Strong, Michael Caine et cette merveilleuse révélation qu’est Taron Egerton !) Rah ! J’avais presque des doutes sur la capacité de Matthew Vaughn à me satisfaire encore : voilà qu’il me démontre une fois de plus que j’avais bien tort de douter de lui ! Une belle claque ! Merveilleux !