Résumer en un long-métrage d'une durée raisonnable l'existence d'un homme qui a vécu 94 ans est d'autant plus complexe quand il s'agit d'une icône française du XXe siècle qui a lutté sa vie durant pour les plus défavorisés. L'homme qui venait du froid, à l'hiver 54 (les souvenirs du film de Denis Amar et de l'interprétation de Lambert Wilson ne sont pas si mauvais), et dont l'appel radiophonique a bouleversé la France, était perclus de doutes quant à son action, chose que le le film de Frédéric Tellier montre un peu mais qui s'efface devant la volonté de fresque qui tend à devenir hagiographique, au fil des minutes. Difficile de faire autrement dans un récit qui est systématiquement accompagné par l'indication de dates clés à l'écran (son côté Wikipédia) et par des archives qui n'apportent rien de plus. Le plus passionnant, dans l'ensemble, est l'évocation de la jeunesse du pas encore héros,et de sa rencontre avec son assistante et bras droit Lucie Coutaz, cofondatrice du mouvement Emmaüs, figure injustement méconnue du parcours de l'abbé Pierre. Sans Benjamin Lavernhe, très impressionnant par son talent mimétique, et sans l'excellente Emmanuelle Bercot, le film apparaîtrait sans doute moins convaincant. Reste que son côté parfois grandiloquent, avec une musique emphatique à la clé, semble à mille lieues des valeurs d'humilité prônées par Henri Grouès, dit L'abbé Pierre.