L'enfer, c'est les autres ? Non, c'est Emmanuel Macron. À l'heure où le Président cherche à expulser tous les SDF de Paris en vue des Jeux Olympiques, Frédéric Tellier signe un biopic nécessaire sur le parcours de l'Abbé Pierre.


Si la réalisation semble parfois manquer de créativité avec une surabondance de flous et de caméras qui tremblent, l'histoire n'en demeure pas moins intéressante. Cela crée une certaine redondance dans les plans, mais le film passe très vite grâce à un montage efficace mais parfois un peu trop mécanique. 

Benjamin Lavernhe est très convaincant dans toutes les versions de l'Abbé Pierre. 


Toutefois, dans ce film censé être une ode à l'humanité, je regrette le manque d'humanité accordé par la réalisation aux personnes en rue ou aidés par Emmaüs. L'Abbé Pierre donne sa vie pour celles des autres et je trouve que certes on les voit à travers lui mais qu'ils ne sont pas assez humanisés. La réalité est dure et violente et ces personnes en rue sont souvent déshumanisées ou ignorées. Si pour l'Abbé Pierre elles ne le sont pas, j'ai trouvé que le film a fait le choix de se centrer sur l'Abbé Pierre en oubliant parfois l'essence même de son combat : apporter de la dignité à toutes et tous.


De plus, cette idée est renforcée par une photographie et une esthétique très soignée qui rend pas toujours service à la cause. Cela crée un manque d’authenticité qui est regrettable. 


De plus, une scène m'a troublé. Il s’agit de celle sur un plateau TV. Son discours plein de tolérance et d'acceptation des autres a semblé ringard à l'heure où ces valeurs semblent complètement omises dans le discours médiatique et dans la société que nous avons bâtie. 

À ce moment-là, une embrouille a éclaté dans la salle de cinéma où je me trouvais. Des spectateurs sont allés enguirlander une dame qui toussait à maintes reprises. Des "Ta gueule" et des "rentrent chez toi" ont retenti dans la salle de cinéma en plein milieu du discours de l'Abbé Pierre. Sans oublier la fin, où durant le générique une personne ayant apprécié le film a applaudi avec une grande solitude. La salle s'est retournée vers elle avec des regards pleins de mépris envers cette personne venue assister à la projection accompagnée de son assistante sociale ou de son éducatrice. Si le film véhicule un message d'espoir précieux, l'être humain quant à lui semble décevant et l'époque tragique.

PatrickAnalyse
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Films 2023

Créée

le 8 nov. 2023

Critique lue 409 fois

6 j'aime

1 commentaire

PatrickAnalyse

Écrit par

Critique lue 409 fois

6
1

D'autres avis sur L'Abbé Pierre - Une vie de combats

L'Abbé Pierre - Une vie de combats
Aude_L
7

Faites votre B-A, allez voir l'Abbé.

[Attention, cette critique, et ce film, ont été réalisés à l'aune des informations disponibles sur la personne de l'Abbé Pierre, le scandale n'ayant éclaté qu'un an après : on a critiqué le film...

le 3 oct. 2023

18 j'aime

L'Abbé Pierre - Une vie de combats
PatrickAnalyse
6

Un film précieux, comme une pierre

L'enfer, c'est les autres ? Non, c'est Emmanuel Macron. À l'heure où le Président cherche à expulser tous les SDF de Paris en vue des Jeux Olympiques, Frédéric Tellier signe un biopic nécessaire sur...

le 8 nov. 2023

6 j'aime

1

Du même critique

La Plateforme 2
PatrickAnalyse
3

Une métaphore de Netflix ?

Une plateforme où l'on sert, en quantité abondante, un caca indigeste à ses abonnés qui consomment sans réfléchir. La Plateforme 2 semble être une métaphore de ce qu'est devenue Netflix : une triste...

le 4 oct. 2024

47 j'aime

3

L'Histoire de Souleymane
PatrickAnalyse
8

A montrer aux téléspectateurs de CNEWS

Là où les médias parlent sans cesse d'immigration et d'OQTF dans le but de créer un climat d'insécurité, Boris Lojkine filme le réel à travers le quotidien d'un jeune travailleur sans-papiers,...

le 9 oct. 2024

14 j'aime

3

Zorro
PatrickAnalyse
3

Zoro : complètement Zéro

Malgré une production soignée, cette nouvelle adaptation de Zoro sombre sous le poids d'une réalisation balourde et maladroite. La série ne réinvente rien et finit même par trahir l'essence de son...

le 6 sept. 2024

13 j'aime

5