Adaptant un téléfilm israélien remarqué, le réalisateur britannique John Madden peut s'appuyer sur un scénario très prometteur, mais ne parvient pas complètement à transformer l'essai.
Essayant de jouer sur tous les tableaux, "The debt" peine en effet à mêler efficacement les registres, écartelé entre huis-clos intimiste, thriller d'espionnage et drame sentimental.
Pourtant la construction narrative apparaît plutôt réussie, avec une gestion habile des flashbacks, de sorte que le spectateur n'est jamais perdu malgré les nombreux personnages et les diverses lignes temporelles.
La partie située à Berlin-Est au début des années 60 est sans doute la plus réussie, avec un huis-clos oppressant durant lequel on ressent bien le malaise de l'héroïne, joliment incarnée par une Jessica Chastain encore débutante.
Le dernier tiers situé 30 ans plus tard bascule dans le récit d'espionnage un peu basique, et s'achève de façon à la fois trop abrupte et presque grand-guignolesque.
A mon avis, le potentiel du scénario (signé Mathew Vaughn), jalonné de plusieurs twists ébouriffants, aurait du orienter "The debt" vers le thriller d'espionnage grand public.
Mais cette approche axée entertainment s'accordait mal avec le contexte de la Shoah, et avec la volonté d'intégrer une dimension émotionnelle forte, voire une réflexion métaphysique autour de notions telles que l'héroïsme, la vengeance et le mensonge.
Ménageant la chèvre et le chou, les auteurs optent pour un choix intermédiaire qui ne satisfait personne : la réflexion et l'émotion demeurent superficielles, tandis que le divertissement apparaît plombé par le rythme lent et l'atmosphère pesante.
On regrettera également quelques choix de casting douteux, à l'image de Sam Worthington, pas franchement à l'aise en agent du Mossad idéaliste.
Malgré ces défauts, "The debt" reste un film plutôt intéressant : on ne s'ennuie jamais devant cette histoire prenante et originale, qui a le mérite d'amorcer certains questionnements dérangeants, comme la supposée absence de révolte du peuple juif durant son extermination.
Il y avait sans doute le potentiel pour faire un très grand film.