Je viens de finir le film et j'ai encore la gorge un peu remplie de larmes ; des larmes d'amertume, des larmes de haine, des larmes d'incompréhension, et puis des larmes de tristesse aussi, simplement. Laissez-moi vous raconter.

L'argent de la vieille, c'est des milliards et des milliards - de lires -, et la vieille c'est la monstrueuse - et merveilleuse - Bette Davis, riche, riche, riche américaine, qui passe ses vacances, et sa vie, et à jouer de l'argent avec des pauvres ; un couple d'italiens, forcément, pour ses vacances en Italie ; généreuse, la vieille leur donne un million à perdre, chaque jour, à perdre contre elle, parfois elle les endette un peu, pour s'amuser ; jusqu'au jour où, il en gagne un autre ; et avec toute la ville qui suit la partie, la folie n'atteint qu'une étincelle pour éclater.

Je n'ai pas envie de vous en dire plus, et je ne sais pas du tout comment pousser des gens à voir un film aussi horrible, aussi malsain ; j'aime bien le glauque et le malsain, beaucoup même, voyez ce dix, mais j'ai le coeur fragile, un fond tendre et plein de vie. Ici, il n'y en aura pas, jouer avec le Destin des gens, qui plus est des pauvres, c'est les détruire un peu, et la vieille s'en fiche, elle s'ennuie, elle n'a jamais appris à perdre et ce n'est pas à l'ordre du jour.

Éloignons-nous de tout ça, soyons froids - ça calme les nerfs -, la vieille joue au Scopone Scientifico, moi non plus je ne sais pas y jouer, et ça n'a aucun intéret, rassurez vous, la tension de chaque pli suffit à nous inclure dans cette partie perverse. Je n'avais jamais vu un Comencini, et si c'est toujours comme ça, je veux tout voir. J'aime sa manière de mettre en scène. Et ses personnages. Pepino et Antonia avant tout le monde, et ces ô combien merveilleux personnages secondaires : l'instituteur communiste, le vieux prêtre, le tricheur amoureux d'Antonia, et les enfants, ces délicieux enfants, où toute la vie se concentre avec une telle intensité. Et puis, Bette Davis, l'horrible, la sublime Bette Davis, immobiles dans son fauteuil roulant, jouant aux cartes malgré la maladie et les attaques, malgré tout, imperméable à la défaite. Et son. Partenaire. Grandiose, dans ses regards terrifiés, dans ses regards honteux. Je voudrais y voir quelque chose, mais je suis encore un peu sous le choc.

Je crois que Comencini déteste les femmes, ou qu'il en a une terreur intime. Les hommes sont faibles, et la perversité de ce jeu de cartes n'a plus de limites face à l'argent de la vieille, face à ce placard rempli de billets.
JZD
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le 10 nov. 2012

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le 10 nov. 2012

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J. Z. D.

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