La partie de cartes entre la vieille riche américaine interprétée par Bette Davis et le couple de chiffonniers Peppino et Antonia entraine, au-delà des péripéties et rebondissements du jeu de scopa, une réflexion philosophique plus générale bien que dans l'ensemble assez modeste. La vieille dame indigne, aux traits ridés et grossièrement maquillés, n'est-elle pas ce rêve argenté qui provoque et fuit les pauvres?
Cocasse, mais cruellement, la partie de cartes établit un rapport de forces malsain entre la rentière autoritaire et égoïste et ses challengers miséreux. Aussi, le dénouement, surprenant et édifiant, ne fait pas de doute: c'est le rêve inaccessible, illusoire, dont se débarrasse définitivement, entre vengeance et résignation,
l'ainée du couple.
Du bidonville romain, où les pauvres s'enflamment, à la villa, où se joue le destin de deux d'entre eux, il y a plus loin que la distance géographique qui les sépare. Cette dimension sociale qu'on attribue au film donne un peu plus de poids à la comédie, comédie à l'italienne dans le sens où la gravité se couvre de dérision. Ainsi, la fonction comique d'Alberto Sordi, en joueur bavard et fébrile, contraste-t-elle avec l'anxiété et la ténacité que caractérise Silvana Mangano.