Léo Joannon, un nom qui ne dit plus rien à personne (ou presque) dans la jeune génération : pourtant, cet honnête artisan sans génie réalisa une petite trentaine de long-métrages entre 1931 et 1967. Cet "Assassin est dans l'annuaire" figure donc parmi ses derniers.
Il s'agit d'une comédie policière assez plaisante, centrée sur sa tête d'affiche Fernandel, qui compose un personnage d'employé de banque timide, naïf voire légèrement idiot (du moins au départ), sur qui les malheurs vont s'abattre avec une régularité désarmante.
Le pauvre bougre y perdra ses illusions (en même temps, "elles sont faites pour ça", dira-t-il) mais au moins se débarrassera-t-il de son carcan de bonnes manières étouffantes et de naïveté crasse.
Le problème du film de Joannon, c'est sa difficulté à gérer le mélange des genres : après une (longue) phase d'exposition tragi-comique, on n'imaginerait pas que le récit va prendre une tournure macabre (si ce n'est que le titre nous le laisse entendre).
Par la suite, quand l'intrigue policière prend le relais, les saillies drolatiques de Fernandel et les bagarres cartoonesques se mêlent assez mal avec la tonalité générale du film, et désamorcent même l'atmosphère inquiétante qui devrait s'installer.
Au-delà de ces menus défauts, "L'assassin est dans l'annuaire" reste une expérience agréable, pour peu que l'on soit sensible au charme désuet de ces bobines en noir en blanc des années 50-60.
Joannon peut s'appuyer sur un scénario ingénieux (quoiqu'assez invraisemblable) adapté d'un polar d'Exbrayat, qui offrira au spectateur son lot de rebondissements et de surprises. Il s'avère réjouissant d'observer cet imbécile heureux remettre enfin en question les différentes formes d'autorité, même si tout cela reste assez gentillet.
Un dernier mot sur les seconds rôles, qui font partie intégrante du plaisir ressenti face à ce genre de sympathiques vieilleries : ici, on est servi, avec la présence de comédiens aussi confirmés que Georges Chamarat, Henri Crémieux, Robert Dalban, Noël Roquevert, la touche de féminité étant apportée par une très jeune Edith Scob et une vieillissante Marie Déa.