Jean Vigo nous prend aux tripes avec cette simple histoire, touchante et amusante, anodine en apparence mais relevant en fait d'une véritable étude des moeurs et des traditions françaises quant aux distinctions entre l'Homme et la Femme.
De Musset énumérait les défauts (distincts) des deux genres dans On ne badine pas avec l'amour, Vigo fait ici mieux : il les met en scène !
Si l'Homme est un peu trop sérieux, parfois trop enthousiaste, jaloux, égoiste voire égocentrique, la Femme cherche le plaisir du divertissement, le luxe parisien, la haute, quoi...
Et, au milieu, le père Jules, gentil, touchant, drôle, omnipotent, omniscient, pas vraiment genré, un fourre tout qui attire l'oeil et crée l'harmonie, réunit les mariés, sauve le job de l'Homme, et se plie à ses caprices, ange gardien discret.
Donc :
1/1 de "morale" : il brise la glace et redéfinit les codes du cinéma romantique, porte un nouveau regard sur le genre, sur les genres. Bravo !
1/1 de maitrise technique : des décors cruciaux, des choix de prises de vues qui collent avec les attentes du spectateur, ne le déçoivent jamais, voire le surprennent : serait-ce des prises de vue réelles sur le bateau quand on voit passer une autre péniche derrière ?!
1/1 de maitrise artistique : Superbe distribution, de belles images marquantes, notamment cette superbe scène dans la brume sur le pont du bateau, des dialogues justes et touchants qui se suffisent et laissent suffisamment de place à l'image.
1/2 de recherche esthétique :Une réelle volonté de toucher, de marquer, de brutaliser aussi le spectateur. Cela marche moyennement pour moi mais il y a tout de même une ambiance dans ce film, quelque chose de beau, et, surtout d'infiniment simple et doux.
Bravo mon Jean Vigo, tu es parti trop tôt...
"Mais s'il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux"