Difficile de critiquer l'histoire en tant que telle, tant le film de Jean Girault est fidèle, tant dans sa trame que dans la forme, à l’œuvre de Molière. Difficile de parler d'une mauvaise séance lorsqu'une histoire emplie de burlesque, de comiques de situations ou de quiproquos parvient à nous distraire. Pourtant, je pense que cette pièce n'est pas conçue pour être adaptée au cinéma, le théâtre et le cinéma étant des arts totalement différents, bien plus que ce qu'on pourrait croire.
Au même titre qu'un opéra est conçu pour être regardé en représentation dans le lieu adéquat plutôt qu'en retransmission, la pièce de théâtre se prête mal au cinéma, tout d'abord parce que certains tics de scènes n'ont rien à faire dans un film. Je pense aux scènes qui se terminent par un personnage prenant la porte. C'est quasi-systématique, et c'est un code propre au théâtre. De même, ces regards-caméras fonctionnent mieux s'il y a un public en face ; ce qui est comique peut devenir rébarbatif en passant de la scène à l'écran.
Les dialogues sont également difficiles à suivre, étant donné qu'ils sont écrits dans un français du XVIIe siècle. Mais c'est toujours plus simple lorsqu'on est dans des conditions de représentations. Devant L'Avare comme devant beaucoup de films, on peut avoir des moments de décrochage, et dans ce cas-ci les textes n'aident vraiment pas, ils suscitent même l'ennui. Ça blablate tout le temps, ça a terriblement mal vieilli et les acteurs adoptent un jeu véritablement théâtral, qui ne se prête également pas au visionnage (il n'y a que De Funès qui parvienne à rester lui-même et à se détacher du casting).
Je fais forcément une critique plutôt négative, car après tout, ce film adopte un point de vue duquel je diverge complètement... Pour autant, je ne peux pas mal le noter, car malgré ses défauts évidents, l'histoire reste sympathique, les costumes sont corrects, et le fait d'être scrupuleusement fidèle à l’œuvre originale permet de ne pas perdre de qualité de narration. Cependant, on pourrait argumenter comme quoi il y a finalement peu de prises de risques, lorsqu'on réalise un tel film.