Marc Dugain a beau être un homme très intéressant, son « Exécution ordinaire » au cinéma ne m'avait pas emballé, un peu plus convaincu par son adaptation d' « Eugénie Grandet ». Entre les deux (sans compter les téléfilms), il y a eu « L'Échange des princesses », à mon sens clairement sa plus grande réussite. Sous une apparence très classique de productions historiques avec décors (surtout intérieurs) opulents et costumes du plus bel effet, se cache en réalité un drame assez intime, complexe, où les situations, les silences, les regards, les quelques balades en forêt en disent infiniment plus que de grands discours ou explications.
Cette plongée au XVIIIème siècle, où France et Espagne ont beaucoup de mal à se remettre d'une guerre aussi longue que meurtrière, est précise, presque subversive dans sa vision, personne ne sortant vraiment grandi de ce drame aux conséquences multiples pour les futurs héritiers des Royaumes, où l'on sent pointer un désir d'émancipation chez certain(e)s, une aspiration à vivre avec une personne aimée, au moins respectée, sans que cela ne soit tambouriné toutes les trente secondes façon « osez le féminisme ». Il y a quelque chose de complexe se dégageant de ces différentes relations, de ces renoncements forcés, où l'horreur de la maladie aura également une place prépondérante.
Aucun sentiment chez les décideurs : tout est stratégie, politique, toujours dans un intérêt personnel ou celui du pays, sans (presque) jamais prêter un instant attention aux « sacrifiés ». Interprétation pouvant surprendre, mais souvent habitée, notamment de la toute jeune Juliane Lepoureau (déjà très convaincante dans la série « L'Absente »), l'une des rares protagonistes vraiment attachantes et « victime » d'une situation à laquelle elle est totalement étrangère. Une réussite, belle et triste, confirmant que Marc Dugain semble plus inspiré lorsqu'il adapte les romans des autres que les siens.