Un début poussif, pour une fille qui veut absolument étudier la littérature, la protagoniste y connaît vraiment que dalle ; comme si une coiffeuse ne pouvait pas savoir qui est E. M. Forster et l'avoir lu par elle-même, et comme si elle ne pouvait pas se douter qu'un essai doit faire plus d'une page. Et puis, heureusement, petit à petit, la subtilité reprend ses droits, la chaleur humaine qui se dégage de l'ensemble fait le reste.
Lewis Gilbert, plus connu pour les trois James Bond qu'il a réalisés, dont le meilleur de la saga avec Roger Moore, L'Espion qui m'aimait, ne cherche pas particulièrement à se distinguer dans sa mise en scène. Mais voilà, comment lui en vouloir ? En dehors du début, le scénario est très bon. Le grand Michael Caine, en professeur-chercheur cynique, alcoolique et dépressif joue une des meilleures partitions de sa carrière. Et sa partenaire Julie Walters parvient à parfaitement à être aussi brillante que son partenaire, en coiffeuse d'origine prolétaire, destinée a-priori à juste perpétuer l'espèce avec un mari qui a envie de se contenter d'une vie familiale simple et d'une vie professionnelle sans ambition, mais qui aspire à autre chose. Donc, comment en vouloir à Lewis Gilbert de se reposer sur ses ingrédients inestimables et exaltants.
Et pour en revenir à la subtilité, le scénario pose beaucoup de questions complexes. Le savoir apporte-t-il le bonheur ? Pas forcément, il suffit de voir le personnage joué par Michael Caine, mais en même temps il peut donner un véritable but à notre vie, on regarde du côté de Rita. Rester sur une vie simple, est-ce source d'une vie heureuse ? Oui ou non, cela dépend de chacun. Oui, pour le mari de la protagoniste, non pour cette dernière qui aurait été frustrée de quelque chose. En résumé, on ne tombe pas du tout ici dans le piège grossier de vouloir donner des réponses simples, voire même simplistes, à des questions complexes. Ça, c'est la deuxième force de l'ensemble, la première étant bien sûr le duo talentueux d'acteurs.
Et la troisième force, découlant des deux autres, c'est le duo improbable de personnages, bien approfondi et très vite attachant, qui vont chacun apporter beaucoup à la vie de l'autre, l'envie du savoir pour l'un, une raison de vivre pour l'autre. Les relations qu'ils entretiennent sont très riches en émotion. En conséquence, on les adopte très vite et on ne les lâche qu'à regret sur une fin ouverte, là aussi un summum de subtilité...
En conclusion, l'Éducation de Rita est un film revigorant, qui va droit au cœur.